Candidatures

Les Alpes françaises, une candidature « pour gagner »

— Publié le 8 novembre 2023

La ligne d’arrivée n’est pas encore en vue. La course compte toujours trois concurrents. Et, avouons-le, il reste difficile de distinguer un leader et deux suiveurs, entre la France, la Suède et la Suisse. Mais la candidature des Alpes françaises pour les Jeux d’hiver en 2030 le claironne sans retenir ses mots : elle y va pour gagner.

Lancé sans trop se faire annoncer à la mi-juillet dernier, au terme d’un déjeuner de travail à l’Elysée avec Emmanuel Macron, le projet olympique et paralympique français a avancé un nouveau pion mardi 7 novembre. Une pièce d’importance : le dépôt au CIO du dossier de candidature, un document de plus d’une centaine de pages préparé et rédigé au sprint, tout schuss, à la façon d’une « opération coup de poing ».

Il a été présenté le même jour aux médias lors d’une conférence de presse au siège du comité olympique français (CNOSF) à Paris. A la tribune, trois des porteurs de la candidature (photo ci-dessus, de gauche à droite) : David Lappartient, le président du CNOSF, Marie-Amélie Le Fur, son homologue du comité national paralympique (CPSF), et Laurent Wauquiez, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes (AURA). A distance, en visioconférence : Renaud Muselier, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), Marie Bochet, huit fois championne paralympique en ski alpin, et Martin Fourcade, quintuple médaillé d’or olympique en biathlon, par ailleurs membre du CIO au sein de la commission des athlètes.

Le casting est soigné, avec deux représentants du mouvement sportif, deux élus politiques et deux athlètes. Rien à dire, l’équilibre est respecté, même si les politiques ont parlé le plus longtemps.

Le dossier est déposé, donc. Sans la moindre surprise, il reprend sans changer une virgule les nouveaux mots d’ordre de l’univers olympique, brandis par le CIO comme autant de signes de ralliement pour les candidats aux Jeux : durabilité, sobriété, maitrise des coûts et utilisation des sites existants. « Des Jeux sobres, économes, où on célèbrera le sport et nos montagnes », a résumé David Lappartient, allant jusqu’à suggérer que la France possédait dans les Alpes « les plus belles montagnes du monde, dessinées pour les Jeux olympiques. »

Pas de surprise dans les grandes lignes, la France respecte à la lettre les règles de l’Agenda 2020+5 du CIO. Dans le détail, le dossier des deux régions françaises se révèle également en accord avec la tendance du moment.

Deux régions, quatre clusters. Avec un attelage politique pour le moins improbable – Laurent Wauquiez toujours chez les Républicains et Renaud Muselier les ayant quittés pour rejoindre Renaissance – l’équilibre de la carte des sites s’annonçait périlleux. Le résultat démontre le contraire. Le projet français propose quatre clusters, deux dans chacune des deux régions.

En région PACA, la ville de Nice se taille la plus belle part avec les épreuves de glace (patinage artistique, hockey sur glace, short-track et curling) dans une nouvelle patinoire à construire. Elle hériterait également d’un village des athlètes, des centres des médias (MPC et IBC) et de la cérémonie de clôture. L’autre pôle de la région, plus alpin, recevrait le skicross et le snowboardcross à Isola 2000, le snowboard et le ski freestyle entre Serre-Chevalier et Montgenèvre.

En région AURA, les deux départements savoyards auront leurs épreuves. En Savoie, le bobsleigh, la luge et le skeleton sur la piste de La Plagne, le ski alpin à Méribel pour les femmes et Courchevel pour les hommes, le tremplin de saut également à Courchevel (saut à skis et saut du combiné nordique). En Haute-Savoie, le ski de fond à La Clusaz (plus le ski de fond du combiné nordique), le biathlon au Grand Bornand, le slalom du ski alpin à Val d’Isère. La région recevrait également la cérémonie d’ouverture.

Seule inconnue : l’anneau de patinage de vitesse. La France n’en possède pas et n’en construira pas. Deux options figurent dans le dossier : un équipement temporaire installé dans un centre de congrès ou un palais des expositions, façon Milan-Cortina 2026, et une piste existante à l’étranger. La question ne sera pas tranchée dans les semaines à venir.

A chacun sa cérémonie. L’idée n’est pas nouvelle, Milan-Cortina 2026 l’éprouvera quatre ans plus tôt : le projet des Alpes française prévoit d’organiser les cérémonies dans deux lieux différents. L’ouverture en région AURA, la clôture à Nice, en région PACA. Pour la première des deux, rien n’est encore décidé. Mais Laurent Wauquiez a suggéré la possibilité de rendre hommage aux trois villes ayant déjà accueilli les Jeux d’hiver : Chamonix (1924), Grenoble (1968) et Albertville (1992). La cérémonie se déroulerait dans l’une d’elles, afin de respecter la volonté des athlètes d’un défilé unique des délégations, mais les deux autres pourraient vivre l’événement via un ensemble de « tableaux », dont le concept reste à inventer.

Un budget encore flou. A la question du budget prévisionnel des Jeux d’hiver 2030, David Lappartient n’a pas avancé de chiffre. Tout juste a-t-il suggéré qu’il ne devrait pas dépasser celui des Jeux de Milan-Cortina 2026, soit 1,5 milliard d’euros. « Les Jeux devront financer les Jeux », a avancé le président du CNOSF, précisant qu’une douzaine de partenaires privés du COJO Paris 2024 soutenait déjà le projet des Alpes françaises.

La France peut-elle l’emporter ? Renaud Muselier veut bien en parier sa chemise. « Nous sommes très bien placés pour gagner », a assuré le président de la région PACA. Moins triomphaliste, Laurent Wauquiez a insisté sur le « déclencheur » que pourrait constituer l’événement olympique et paralympique pour « faire de nos montagnes, dans les deux régions, les plus durables au monde. »

Prochaine étape : l’audition de la candidature française devant la commission de futur hôte du CIO. Elle est prévue le 21 novembre. David Lappartient l’a annoncé : elle se fera en visioconférence, depuis le siège d CNOSF à Paris, avec tous les porteurs du projet. En signe d’équilibre.