— Publié le 12 juin 2023

Les Russes rapportent gros mais restent à la porte

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Une simple pause avant la reprise ? A la différence de la grande majorité des sports olympiques d’été, le patinage continue de laisser les athlètes russes et biélorusses à la porte de ses compétitions.

Son instance internationale, l’ISU, a annoncé dimanche 11 juin dans un communiqué assez laconique la décision de son conseil de maintenir la suspension des patineurs des deux pays, décidée au début du mois de mars 2022, après le déclenchement de la guerre en Ukraine.

La décision de l’ISU était attendue. Mais, au vu de la tendance actuelle au sein du mouvement olympique, elle s’annonçait plutôt inverse. Au cours des dernières semaines, les fédérations internationales ont quasiment toutes suivi, les unes après les autres, les recommandations de la commission exécutive du CIO de réintégrer les athlètes russes et biélorusses.

World Rowing, l’instance de l’aviron, a été la dernière en date à rejoindre le mouvement. Plus tôt au mois de juin, la Fédération internationale de badminton (BWF) s’est rangée elle aussi dans le camp ouvert par le CIO, après avoir pourtant décidé dans un premier temps de maintenir la suspension des joueurs russes et biélorusses.

L’ISU l’explique dans son communiqué : les membres de son conseil, réunis au cours du weekend à Budapest, ont examiné dans le détail les recommandations de la commission exécutive du CIO. Ils ont décidé « d’explorer les questions de faisabilité en ce qui concerne les voies potentielles de mise en œuvre » de ces recommandations dans les disciplines du patinage. En clair, ils ne tournent pas complètement le dos à un retour éventuel des athlètes russes et biélorusses. Mais en attendant, les patineurs des deux pays restent suspendus.

Son communiqué le suggère sans nuance : l’ISU a choisi le camp de l’Ukraine. « L’Union internationale de patinage (ISU) a soutenu les fédérations de patinage d’Ukraine depuis le début de la guerre, en mettant en œuvre la communication 2469 de l’ISU et en accordant également un soutien financier pour aider les patineurs ukrainiens, insiste le texte. L’ISU réitère sa sympathie et sa solidarité envers toutes les personnes touchées par la guerre en Ukraine. Elle maintient sa condamnation de l’invasion russe de l’Ukraine dans les termes les plus forts possibles. »

A Moscou, la décision de l’ISU a été commentée sans retenue par plusieurs grands noms du patinage artistique. En tête de liste, Tatiana Navka, la championne olympique de danse sur glace aux Jeux de Turin 2006, fidèle parmi les fidèles du régime de Vladimir Poutine depuis son mariage avec Dmitry Peskov, le secrétaire de presse du président russe.

« Stupidité et injustice, a-t-elle déclaré au site sport-express. Une fois de plus, l’ISU montre que les gens utilisent le sport pour atteindre certains de leurs objectifs. On espérait que la raison l’emporterait. Mais apparemment, ce n’est pas le cas. »

Même indignation chez l’entraîneur Tatyana Tarasova. « La décision est injuste, a-t-elle déclaré. Comment allons nous pouvoir revenir sur la scène internationale ? Nous devrions avoir des gens qui nous protègent, mais ils ne le font pas. »

Ilya Averbukh, le médaillé d’argent en danse sur glace aux Jeux de Salt Lake City en 2002, avoue s’inquiéter surtout pour la relève du patinage russe. « Je ne me faisais pas d’illusions sur la décision de l’ISU concernant les seniors, a-t-il expliqué à sport-express. Mais pour les juniors, on espérait secrètement. Ils ont besoin de compétitions internationales. Je suis très déçu de cette décision. Je la considère comme illégale et néfaste pour le développement du patinage artistique mondial ! C’est une décision à courte vue. Le niveau du patinage va progressivement stagner. »

A l’évidence, l’ISU n’a pas laissé les considérations purement financières peser sur sa décision. Selon un rapport publié sur son site officiel, la suspension des athlètes russes lui a déjà coûté cher. Leur absence des compétitions internationales depuis la fin des Jeux d’hiver de Pékin 2022 devrait entraîner cette année des pertes estimées à 1 million de francs suisses. En cause, l’absence de recettes de publicité et droits de télévision venues de Russie.