— Publié le 6 novembre 2020

« Nous serons heureux de soutenir la candidature de la Russie »

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Ils sont deux. Un Roumain, le sortant. Et un Russe, le challenger. Deux candidats en lice pour la présidence de Rugby Europe. Octavian Morariu (photo ci-dessous), ancien international dans la sélection roumaine, par ailleurs membre du CIO, vise un troisième mandat à la tête de l’instance continentale. Kirill Yashenkov, l’actuel vice-président de la Fédération russe de rugby, lorgne sur un premier. L’élection doit se dérouler pendant le prochain congrès de Rugby Europe, prévu les 4 et 5 décembre en mode virtuel.

Elu une première fois en 2012, puis réélu quatre ans plus tard, Octavian Morariu ambitionne de boucler la boucle par un ultime mandat. Il a répondu, en français, aux questions de FrancsJeux.

FrancsJeux : Quelle action réalisée depuis votre arrivée à la présidence vous rend-elle le plus fier ? 

Octavian Morariu : Rugby Europe est devenue ces dernières années une instance plus professionnelle et plus efficace dans son fonctionnement. Nous sommes passés d’une structure à 2 employés à une équipe de 10 personnes, avec des experts dans chacun des domaines clés de notre développement. Nous avons recruté un directeur général début 2019, fort d’une expérience de 20 ans dans le marketing sportif, un directeur des compétitions très expérimenté au niveau international, mais aussi l’ancien patron des arbitres à la Fédération française de rugby, et enfin un responsable du digital venu de la Fédération écossaise de rugby. Nous avons également réorganisé fondamentalement la gouvernance de Rugby Europe, en faisant évoluer notre système de votes pour permettre une meilleure représentativité des pays. Nous avons aussi revu la composition de notre comité directeur, en réduisant le nombre d’élus et en intégrant un membre indépendant pour plus d’efficacité. Même évolution pour les commissions thématiques : elles représentaient jusqu’alors plus de 120 personnes pour 6 employés, contre 4 commissions pour un total de 42 représentants aujourd’hui. Cela permet d’accélérer les orientations stratégiques et les prises de décision. Nous avons revu notre système de compétitions et les procédures d’attribution de leur organisation, avec des appels d’offres, qui nous permettent d’avoir un calendrier établi sur un cycle de 4 ans, plus favorable aux participants et aux fédérations hôtes. Cela représente de vrais leviers pour notre politique commerciale, garantissant à nos partenaires une visibilité accrue, et des opportunités pour mettre en place leur stratégie d’activation au niveau européen. Grâce à cela, notre partenariat avec la Société Générale a été renouvelé, et un accord de 4 ans a été conclu avec l’équipementier italien ERREA Sport. Cette dynamique se traduit aussi par la mise en place d’accords avec des régies commerciales, qui nous accompagnent dans la prospection de nouveaux partenaires commerciaux et dans la distribution de nos compétitions auprès des médias internationaux.

Dans quelle situation se trouve aujourd’hui Rugby Europe, avec la crise sanitaire et l’arrêt des compétitions jusqu’à la fin de l’année ?

L’arrêt des compétitions a été très inattendu, pour notre organisation et surtout pour nos pays. Mais nous devons faire face. Au-delà de l’aspect sportif, la crise sanitaire a impacté les ressources financières de l’ensemble de nos fédérations. Nous leur apportons une aide directe, via un fond de solidarité de 250.000 euros, destiné à aider les plus en difficulté à assurer leur survie jusqu’à la reprise des activités. A Rugby Europe, nous avons renégocié avec nos partenaires le maintien de leurs apports, et avec World Rugby le maintien des financements. Durant cette période, nous avons travaillé pour préparer le retour au jeu sur des sujets de fond importants pour l’avenir du rugby européen. Ainsi, nous pouvons confirmer la mise en place de l’arbitrage vidéo (TMO) et du protocole commotion HIA dès le prochain Rugby Europe Championship.

Votre rival pour la présidence, le Russe Kirill Yashenkov, propose une réforme du format et du calendrier des compétitions européennes. Quelle est votre position sur cette question ?

Tout dépend de quelle réforme nous parlons. Il y a des réalités du terrain et de la vie de nos fédérations membres qu’il faut connaître et comprendre avant de parler de réforme. La définition du calendrier des compétitions européennes est un sujet très complexe non seulement en Europe, mais sur tous les continents. Il dépend en partie de World Rugby, des événements internationaux, des compétitions nationales professionnelles et des temps de repos pour préserver la santé des joueurs. Nous devons aussi prendre en compte la diversité des climats de notre continent qui contraignent certains de nos pays à ne pas jouer durant plusieurs mois de l’année. Rugby Europe organise chaque saison près de 600 matches et une vingtaine de tournois différents, après avoir revu en profondeur la structure de ces compétitions pour les rendre plus attrayantes et plus en accord avec les besoins de nos membres. Nous sommes à leur service, nous écoutons leurs propositions ou suggestions. Nous avons ainsi consulté l’ensemble de nos membres sur le rugby à 7, au printemps 2019, avant d’articuler notre stratégie pour les 4 prochaines années sur nos compétitions.

Comment comptez-vous favoriser l’émergence de nouvelles nations dans le rugby européen, à l’image du Japon au niveau mondial ?

Rugby Europe compte 48 fédérations membres avec des profils très différents. En dehors des six nations majeures, nous avons une douzaine de pays participant au Rugby Europe Championship ou au Rugby Europe Trophy, avec des organisations structurées. Les autres nations, plus petites, reposent sur des joueurs amateurs. Nous devons apporter notre soutien à chacune d’entre elles selon leurs ambitions. Cela passe d’abord par la structuration du rugby dans les pays, la formation des éducateurs, l’organisation des compétitions domestiques, les conseils sur la recherche de financement auprès des institutions publiques, des partenaires privés pour soutenir durablement les programmes rugby. Cela passe également par la mise en place de programmes de développement pour les équipes nationales U18 et U20, afin de partager les expériences et se préparer au rugby international. Pour le haut niveau, le rôle de Rugby Europe est de créer les conditions pour que les nations aient un développement durable et puissent sans cesse progresser. C’est aussi tout l’écosystème marketing et communication qui est à fortifier pour générer et accroitre l’intérêt pour notre sport, en médiatisant les rencontres à la télévision et via les canaux digitaux, en développant les partenariats média et digitaux, en modernisant les matches pour en faire de vrais événements attractifs. La Géorgie, l’Espagne, le Portugal, la Russie, la Roumanie, sont engagées dans ce processus, avec le soutien de Rugby Europe, tout comme l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, la Pologne ou la Suisse.

Quelle est votre position sur la candidature de la Russie à la Coupe du Monde en 2027/2031 ?

La Russie est un partenaire de Rugby Europe, qui contribue à l’organisation de nombreuses compétitions européennes (rugby à 7, championnat d’Europe U18, beach et snow rugby). Ce pays a affiché des résultats en progrès sur le terrain ces dernières années, avec ses titres de champion d’Europe à 7 ou sa participation à la dernière Coupe du Monde au Japon. Elle a démontré sa capacité à organiser des événements internationaux, dont la Coupe du Monde de rugby à 7 en 2013. La Russie bénéficie à présent des stades de la Coupe du Monde de football 2018 pour organiser ses matches, comme à Kaliningrad où a été disputée la finale du championnat d’Europe U18 l’an passé. En cela, elle possède de nombreux atouts à valoriser pour accueillir une Coupe du Monde dans la prochaine décennie. J’ai d’ailleurs évoqué ce sujet pour la première fois avec le président Artemiev en 2018 à Moscou. Pour toutes ces raisons, et parce que la Russie est un membre de Rugby Europe, nous serons heureux de soutenir sa candidature.