— Publié le 18 novembre 2022

Gianni Infantino, tout seul au monde

Institutions Focus

L’exercice démocratique prend parfois une étrange tournure dans le mouvement sportif international. Les élections, surtout, offrent l’image suspecte de plébiscites, où il est seulement demandé aux électeurs de choisir entre le sortant… et personne d’autre.

Le prochain scrutin à la FIFA, prévu le 16 mars 2023 à Kigali, au Rwanda, n’inversera pas la tendance. L’actuel président de l’instance, Gianni Infantino, l’abordera sans la moindre opposition. La FIFA l’a annoncé jeudi 17 février, à trois jours de l’ouverture du Mondial au Qatar : le dirigeant italo-suisse est le seul candidat enregistré.

« Aucune autre candidature n’a été soumise » par les fédérations membres, a expliqué la FIFA dans un communiqué. Elu pour la première fois en 2016, au terme d’un scrutin où il était opposé à trois rivaux – le Bahraini Sheikh Salman bin Ebrahim al-Khalifa, le Jordanien Ali bin al-Hussein et le Français Jérôme Champagne -, Gianni Infantino a été réélu par acclamation en 2019. Son troisième mandat devrait débuter sur le même ton, en mars prochain, à une semaine de son 53ème anniversaire.

Gianni Infantino a annoncé sa candidature en mars dernier à Doha, à près d’une année du vote du congrès. Depuis, ses rivaux potentiels sont restés silencieux. L’ancien joueur suisse Ramon Vega, 51 ans, a surpris son monde par un post sur son compte Twitter, mercredi 16 novembre, où il remercie toutes les fédérations nationales qui lui ont donné l’occasion de se présenter aux élections en 2023. Mais l’ancien international, passé notamment par Tottenham en Premier League, n’a pas concrétisé son intention par une candidature formelle.

Gagné d’avance, donc, pour Gianni Infantino. Mais sa réélection pourrait s’avérer plus contestée que prévu. Le président de la Fédération allemande de football (DFB), Bernd Neuendorf, a fait savoir qu’il ne le soutiendrait pas.

Le dirigeant allemand attendait du président de la FIFA « une considération plus marquée pour les droits humains ainsi qu’un engagement plus important dans les questions humanitaires« . Il attend toujours.

Gianni Infantino s’est bien exprimé, au cours des dernières semaines, dans la cacophonie des polémiques et controverses entourant le Mondial au Qatar. Mais il l’a fait seulement pour demander aux équipes qualifiées de se « concentrer désormais sur le football‘. L’opinion, et une partie des fédérations nationales, auraient sans doute apprécié une prise de position moins mollassonne.

A son arrivée sur le trône de la FIFA en 2016, après le scandale du FIFAgate et les turbulences de la fin de l’ère Sepp Blatter, Gianni Infantino avait promis de « restaurer l’image de la FIFA« . Après presque deux mandats, le résultat prête au débat. Certes, Gianni Infantino peut se vanter d’avoir conforté la richesse de la FIFA, malgré la crise du COVID, avec un chiffre d’affaires record de 7 milliards de dollars pour la période 2018-2022.

Sa décision de porter la phase finale de la Coupe du Monde de 32 à 48 équipes à partir de l’édition 2026 aux Etats-Unis, Canada et Mexique, et sa version féminine de 24 à 32 équipes dès l’an prochain en Australie et en Nouvelle-Zélande, devrait encore contribuer à gonfler les comptes de la FIFA. Plus d’équipes, donc plus de rencontres, pour des droits de télévision encore à la hausse. Gianni Infantino n’ignore rien des lois du marché.

Mais sa volonté de réforme du calendrier international, centrée sur le projet d’un Mondial une année sur deux, a eu pour seul effet d’afficher les divisions entre les confédérations continentales. Prudent, Gianni Infantino a annoncé en mars dernier sa décision de renvoyer le projet dans les oubliettes de l’histoire. Au même moment, il évoquait publiquement sa décision de solliciter un troisième mandat.