— Publié le 13 décembre 2021

Malgré la crise, la paix par le sport gagne encore du terrain

Institutions Focus

L’événement est devenu un rituel. Chaque année, à pareille époque, l’organisation monégasque Peace & Sport décerne ses trophées annuels. Pour la deuxième édition consécutive, la cérémonie de remise s’est déroulée en mode virtuel.

La cuvée 2021 compte cinq trophées, dont les lauréats ont été dévoilés à raison d’un par jour, entre le 7 et 11 décembre. En fin de liste, l’un des plus attendus, celui du Champion de la Paix. Le jury de Peace & Sport, composé d’anciens athlètes tous membres de l’organisation non-gouvernementale , l’a attribué au joueur de basket-ball français Rudy Gobert (photo ci-dessus). Il succède à trois figures des sports collectifs, récompensées entre 2018 et 2020 : le Français Blaise Matuidi, le Sud-Africain Siya Kolisi et l’Argentin Lionel Messi.

L’année 2021 restera-t-elle comme un grand cru pour le mouvement de la paix par le sport ? Que faut-il en retenir ? Joël Bouzou, le président de Peace & Sport, a répondu aux questions de FrancsJeux.

FrancsJeux : Malgré la crise sanitaire, l’année 2021 a-t-elle fait avancer la cause de la paix par le sport ?

Joël Bouzou : On constate aujourd’hui une prise de conscience des gouvernements sur cette question. Ils sont de plus en plus nombreux à considérer le sport comme un outil au service de la solidarité, de l’inclusion et de l’éducation. La crise sanitaire n’a pas aidé, en éloignant beaucoup de gens de la pratique sportive, mais le phénomène est désormais assez solidement ancré pour avoir résisté. L’opération Carton Blanc organisée par Peace & Sport à l’occasion du 6 avril, Journée internationale du développement et de la paix par le sport, a touché  cette année 170 millions de personnes dans 117 pays. Il s’agit de notre meilleur résultat. Il faut maintenant faire en sorte que les gens retournent au sport un peu partout dans le monde.

Les Jeux de Tokyo ont-ils servi la cause ?

Oui. Ils ont eu lieu, malgré les doutes et la situation. Les Jeux de Tokyo ont permis de parler de sport, mais d’en parler d’une certaine façon, souvent unique à l’événement olympique. Je retiens notamment un combat de judo entre une Israélienne, Raz Hershko, et une Saoudienne, Tahani Alqahtani. Les deux femmes se sont affrontées sur le tatami. A la fin du combat, elles se sont serrées la main. En d’autres temps, le combat n’aurait pas eu lieu. Il faut féliciter le CIO pour rendre un tel événement possible. Il faut aussi reconnaître tout le travail accompli par la Fédération internationale de judo et son président, Marius Vizer. Ils ne perdent jamais de vue ce qui peut être fait non pas seulement pour le sport, mais aussi par le sport.

Un nombre grandissant de fédérations internationales ont développé des programmes axés sur la paix par le sport. La crise sanitaire, et ses conséquences économiques, ne les ont-elles pas conduites à sacrifier ces initiatives au profit d’autres priorités ?

Je ne crois pas. Le CIO en tête, qui a ajouté cette année le mot « Ensemble » à la devise des Jeux, le mouvement olympique a compris que le sport était en train de devenir un pilier important de la stabilité des sociétés. La trêve olympique vient d’être signée. La problématique de la paix par le sport est de plus en plus mature. Elle va maintenant descendre des fédérations internationales vers les fédérations nationales. A l’avenir, les instances ne devront pas seulement prendre en compte le haut niveau et les performances pour être considérées dans le mouvement sportif. Elles devront aussi intégrer les questions de solidarité, d’inclusion, de respect…

Le phénomène est-il également valable pour les athlètes ?

Certainement. Le profil du champion est en train de changer. Et il va encore évoluer. Pour être considéré comme un champion, un athlète ne peut plus seulement battre un record ou remporter une médaille. Il doit avoir un impact social. L’Association mondiale des olympiens (Joël Bouzou en est également le président) développe de plus en plus de programmes destinés à aider les athlètes à servir la société, notamment la jeunesse.

Rudy Gobert, lauréat du trophée de Champion de la Paix de Peace & Sport pour l’année 2021, colle-t-il à ce nouveau modèle ?

Oui. Il a ouvert une fondation, Rudy’s Kids, à destination de l’enfance. Elle développe des programmes sur la santé, l’éducation, la citoyenneté. A travers cette initiative, Rudy a un impact direct sur la vie des jeunes aidés par sa fondation. Il est également impliqué dans le soutien d’une association rwandaise destinée aux sportives.

 

Les lauréats des Peace and Sport Awards pour l’année 2021 :

  • La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge a reçu le prix de l’« ONG de l’année » pour son projet « S’unir par le pouvoir du football »
  • Le Secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports du gouvernement du Portugal a remporté le prix « Institution de l’année » pour son Plan national pour l’éthique dans le sport (NPES), qui est mis en œuvre par l’Institut portugais des sports et de la jeunesse (IPDJ) depuis 2012
  • La World Rafting Federation a obtenu le plus de votes pour le prix « APRIL6 Initiative of the Year » pour sa campagne de sensibilisation numérique « Be white water »
  • Les animateurs de paix de l’ONG Cop ​​Colombia Internacional ont été récompensés par le « Prix Spécial du Jury » pour leur rôle essentiel dans la promotion de la paix à travers la pratique du football à Usme en Colombie
  • Le joueur de basket-ball français Rudy Gobert a été désigné Champion de la Paix.