— Publié le 19 janvier 2016

« Je suis heureux de faire la course en tête »

Institutions Focus

Une page va bientôt se tourner pour l’Union internationale de patinage (ISU). Samedi 11 juin 2016, à Dubrovnik, son président italien, Ottavio Cinquanta, rendra les clefs de son bureau après un « règne » de 22 ans. Qui lui succédera? Le Français Didier Gailhaguet ne fait pas mystère de ses ambitions. Ancien patineur, puis entraîneur à succès (avec Surya Bonaly, notamment), l’actuel président de la Fédération française des sports de glace (FFSG) a lancé le premier sa campagne. Avec ce slogan: « Changer avant d’être changé ». A 62 ans, il assure incarner le changement, l’innovation et la transparence. Il l’a expliqué longuement à FrancsJeux.

FrancsJeux: Quelles sont les raisons qui ont motivé votre candidature à la présidence de l’ISU?

Didier Gailhaguet: Elles sont nombreuses, mais la plus importante tient à ma passion pour le patinage. Il est au centre de ma vie et de mon engagement depuis 35 ans. Je porte sur ma discipline et sur son institution un regard d’ancien sportif, mais également de cadre technique. Et j’ai acquis au sein de la FFSG une expérience de la gestion d’une fédération. J’y ai accompli un gros travail pour la remettre à flots, ses comptes révélant un trou de presque 10 millions d’euros à mon arrivée à la présidence. Une élection se profile. Je me suis dit: « Pourquoi pas moi? » J’ai toujours été force de propositions au sein de l’ISU.

Comment se présente cette élection?

Elle aurait dû se dérouler après les Jeux de Sotchi, mais Ottavio Cinquanta et son équipe ont souhaité rester deux années de plus. Elle se tiendra donc en juin 2016, avec en ligne de mire un mandat de deux ans, l’élection suivante étant programmée pour l’année 2018. J’ai été le premier à me déclarer. Et je suis heureux de faire la course en tête. A ce jour, je ne vois pas grand-monde se manifester pour la présidence. J’entends seulement parler d’une possible candidature du Néerlandais Jan Dijkema, vice-président de l’ISU en charge du patinage de vitesse.

Votre manifeste de campagne s’intitule: « Changer avant d’être changé ». Il suggère que le moment est venu de réformer l’ISU…

Mon programme de campagne s’articule autour de cinq thèmes et d’une cinquantaine de propositions. Mais, en effet, il est très orienté vers un profond changement, à la fois dans l’organisation de l’ISU, sa gouvernance et son image. Mon plan sur 6 ans, donc deux mandats, suggère par exemple de modifier les statuts de l’ISU afin de l’organiser à la façon d’une entreprise, avec un conseil d’administration et un organe de surveillance. Une telle organisation permettrait une plus grande transparence. Et nous en avons grand besoin. Aujourd’hui, le choix des villes hôtes des grands événements de patinage se fait de façon obscure, sans qu’on sache vraiment qui est candidat et pourquoi tel dossier a été choisi. Je prône également une alternance, pour la présidence, entre les deux branches de l’Union que sont la vitesse et l’artistique. Avec Olaf Poulsen puis Ottavio Cinquanta, la vitesse a détenu la présidence depuis 36 ans.

Que proposez-vous pour développer les disciplines?

Je souhaite doubler le budget de notre plan de développement, pour le porter de 5 à 10 millions de dollars. Il comporterait un volet détection et un autre consacré à la formation et aux équipements. Surtout, il prévoirait de signer des contrats d’objectif avec les fédérations nationales qui le souhaiteraient – l’ISU en compte actuellement 75 – avec une évaluation tous les deux ans du travail accompli et des actions menées. Je veux aussi amener le patinage au centre des villes, en essayant d’établir des passerelles avec les disciplines extrêmes, très en vogue chez les jeunes, comme le « Crash Ice » ou le « Ice Derby ». Enfin, je propose de retrouver une certaine équité dans les primes versées aux athlètes dans les grandes compétitions. Aujourd’hui, un titre mondial rapporte 40 à 45.000 dollars en patinage artistique et environ 10.000 dollars en vitesse. Toutes les médailles doivent se valoir.

Vous avez été exclu de l’ISU après la polémique sur le jugement aux Jeux de Salt Lake City en 2002. Cet épisode de votre carrière de dirigeant peut-il peser contre vous pendant la campagne?

Cet affaire remonte à presque 15 ans. J’en ai accepté la sentence, mais j’en ai toujours refusé l’accusation. Personne n’a jamais pu faire la preuve de ce qui m’était reproché. Je l’ai vécu comme une vraie injustice. A l’époque, j’ai été pris dans quelque chose qui m’a totalement dépassé.

La campagne pour l’élection à l’ISU se déroule dans un climat très particulier, avec une succession d’affaires qui jettent un certain discrédit sur les institutions sportives…

Je n’en fais pas abstraction. Au contraire, je prône une plus grande éthique et une vraie transparence, avec une révision de l’institution. Il est temps que les décisions de l’ISU et ses contrats soient publics. Notre organisation a besoin d’une plus grande clarté.