Candidatures

Pour 2024, les candidats abattent leurs premières cartes

— Publié le 2 novembre 2015

Les vétérans des campagnes olympiques le savent et le chantonnent volontiers comme un refrain: la course pour les Jeux ressemblent plus à un marathon qu’à une épreuve de vitesse. Il n’empêche, personne n’a envie d’y manquer le départ. A Washington, la semaine passée, l’assemblée générale de l’Association des comités nationaux olympiques (ACNO) a réuni au Hilton les représentants de 204 pays. Elle a également, osons dire surtout, offert aux cinq villes candidates aux Jeux de 2024 une opportunité d’avancer leurs premier pions.

A moins de deux ans du vote, prévu le 13 septembre 2017 à Lima, au Pérou, les équipes de Budapest, Hambourg, Los Angeles, Paris et Rome ont transformé le rez-de-chaussée et le premier sous-sol de l’hôtel Hilton en un discret terrain de manœuvres. Parmi leurs cibles: la presse internationale. Hongrois, Allemands, Américains, Français et Italiens ont rencontré les médias présents à Washington. FrancsJeux y était. Après avoir fait la tournée des popotes, un comparatif s’impose.

Budapest. Une présence discrète. Le patron du comité de candidature, Fürjes Balazs, un nouveau venu dans le mouvement olympique, issu du monde politique, était accompagné d’un conseiller nettement plus rompu aux règles du jeu, Laszlo Vajda, passé dernièrement par Pékin 2022. Les deux hommes ont adopté une posture résolument humble. Ils avouent être là pour « découvrir et apprendre ». Mais leur projet, très marqué par l’esprit de l’Agenda 2020 du CIO, se révèle solide et cohérent. Les deux Hongrois n’éludent pas les questions, se montrent disponibles et savent écouter. Ils ne cherchent pas à s’affranchir d’une position de modeste outsider, mais connaissent le sujet et savent se montrer convaincants.

Hambourg. Présence discrète, également. Nikolas Hill, le directeur de la candidature, accompagné d’une directrice de la communication passant avec un saisissant talent de l’allemand au français ou à l’anglais. L’école Thomas Bach… Nikolas Hill, issu des cercles politiques, est encore peu connu du mouvement olympique. Mais la pertinence de son discours et la fraîcheur de ses idées font mouche. Les Allemands ne s’en cachent pas: leurs moyens et leur stratégie connaîtront un sérieux coup d’accélérateur après le référendum du 29 novembre 2015, une étape dont ils ne doutent pas qu’elle sera favorable. Sa communication ne fait pas dans l’esbroufe, mais l’équipe d’Hambourg a marqué des points.

Los Angeles. Le grand jeu. Normal, les Américains jouaient à domicile. Janet Evans, la vice-présidente de Los Angeles 2024, n’a fait qu’un passage éclair à Washington, en tout début de semaine, sollicitée au même moment pour une apparition à Phoenix. Mais les deux tauliers du projet californien, le maire Eric Garcetti et le patron de la candidature, Casey Wasserman, ont plus que largement compensé son absence. Le premier, surtout. Sourire hollywoodien, familiarité soignée et sens consommé de la communication, Eric Garcetti trompe les apparences. Derrière son image de politicien se révèle une connaissance approfondie du dossier. L’équipe de Los Angeles a reçu la presse dans un salon assez vaste pour y célébrer un mariage. Malgré un emploi du temps sans temps mort, Eric Garcetti n’abrège pas l’échange, répond avec précision à toutes les questions, insistant avec plaisir sur la fibre olympique de sa ville et son caractère universel et multiculturel. Très fort.

Paris. Bernard Lapasset retenu à Londres pour la Coupe du Monde de rugby, l’équipe française a présenté aux médias anglo-saxons deux autres piliers du projet, Tony Estanguet, le co-président du comité de candidature, et Etienne Thobois, le directeur général. Une « table ronde », au sens le plus littéral du terme, d’une vingtaine de minutes orchestrée par Mike Lee, le patron de l’agence britannique Vero Communications. De l’avis des reporters invités, le discours a été sérieux, précis et solide. « Ils semblent avoir retenu les leçons de l’échec de Paris 2012 », analyse un journaliste américain. Réaction d’un reporter anglais après une interview avec Tony Estanguet: « Sympa et impressionnant. »

Rome. Le show Luca di Montezemolo. L’ancien patron de Ferrari et de la Coupe du Monde de football en 1990 a reçu les médias étrangers au bar du Hilton. Bronzé comme s’il rentrait des Bermudes, le boss de Rome 2024 la joue à l’italienne, avec chaleur, humour et sens de l’improvisation. Il s’exprime en anglais mais demande à FrancsJeux de poser ses questions en français, « car j’aime entendre votre langue. » Jamais avare de confidences personnelles, il n’a visiblement pas répété son discours, au risque de se perdre parfois en route, mais il a le mérite de refuser la langue de bois. A la question de la maigreur du budget de la candidature italienne, annoncé à 10 millions d’euros, il répond: « 10 millions? Mais qui vous a donné un chiffre pareil? Le budget, je ne le connais pas encore, nous l’aurons en janvier. Mais si nous avions seulement 10 millions, je ne serais pas assis en face de vous aujourd’hui. »