— Publié le 11 septembre 2015

A Rio, les Jeux devraient parler français

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Les textes sont formels: le français est, avec l’anglais, la langue officielle des Jeux olympiques. Une règle de conduite écrite noir sur blanc, en 23ème position, dans la Charte olympique. Gare aux contrevenants, donc. Mais qu’en sera-t-il dans la réalité, sur le terrain, aux prochains Jeux de Rio, en août 2016?

A moins d’une année de l’événement, les indicateurs semblent plutôt positifs. Michaëlle Jean, la Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), l’a expliqué à FrancsJeux: « La langue française est très présente au Brésil, elle y est largement enseignée. Carlos Nuzman, le patron du comité d’organisation des Jeux de Rio, parle très bien français. Les Brésiliens font preuve de beaucoup de bonne volonté pour faire respecter la Charte olympique. Mais nous n’agissons pas en gendarmes. Au contraire, nous insistons sur la plus-value de la diversité linguistique. Sans la présence de la langue française, les Jeux de Rio souffriraient d’une forme de déficit. »

Au-delà des discours et des intentions, la démarche de l’OIF se veut concrète. Michaëlle Jean a établi les premiers contacts avec Carlos Nuzman aux Jeux de Londres en 2012, où elle était Grand témoin de la francophonie aux JO. En août dernier, une mission a été conduite à Rio. Bonne surprise: la signalétique et les billets des cérémonies marquant J – 1 an avant l’ouverture des Jeux étaient rédigés en trois langues, brésilien, anglais et français.

Audrey Delacroix, en charge des questions olympiques au cabinet de Michaëlle Jean à l’OIF, explique: « Nous allons renouveler l’an prochain à Rio une opération déjà menée en 2014 aux Jeux d’hiver de Sotchi, l’envoi de volontaires traducteurs mis à disposition du comité d’organisation. Ils seront, pour un grand nombre d’entre eux, issus de pays africains. En prime, un jeune volontaire francophone va animer le site et les réseaux sociaux de Rio 2016. Les Brésiliens ont pris un certain retard dans la traduction des documents, mais nous allons accompagner leurs efforts pour le combler ». Une convention entre l’OIF et le comité d’organisation des Jeux devrait être être signée, sans doute avant la fin de l’année, pour formaliser la coopération entre les deux entités.

A Rio, l’an prochain, l’OIF pourra disposer d’un espace dédié, où présenter ses programmes et exposer ses activités. « Il sera situé dans un lieu fort en symboles, proche du quai où accostaient les bateaux négriers en provenance d’Afrique », explique Michaëlle Jean.

Autre initiative, la nomination de Manu Dibango, le chanteur et saxophoniste camerounais, comme Grand témoin de la francophonie aux Jeux de Rio. A 81 ans, le musicien africain aime se qualifier d' »éternel étudiant. » Il ironise: « Une telle fonction exige un certain doigté. Et ça, je crois que ça me connaît ». Manu Dibango a accompagné Michaëlle Jean au siège du CIO à Lausanne, en début de semaine, pour y rencontrer Thomas Bach (notre photo). Il effectuera un premier voyage au Brésil, à Rio et Brasilia, au mois de novembre. Son assistante explique: « Il prend sa mission très au sérieux. Il a même décidé de mettre entre parenthèses certaines de ses autres activités pour se rendre plus disponible. »

De son propre aveu, Manu Dibango voue une immense passion au sport. Il raconte avoir écrit une chanson pour la Coupe des Tropiques en 1964, puis composé l’hymne de la CAN de football en 1972. « J’étais présent à Kinshasa pour le « Combat du siècle » entre Ali et Frazier », confie-t-il. Ses sports préférés: football, Formule 1 et athlétisme. « J’ai longtemps suivi de très près le Tour de France, dit-il. Mais aujourd’hui, j’ai plus de mal à m’y intéresser. »

Pour les Jeux, il projette de composer une chanson, en français, qui serait interprétée par certains artistes francophones selon le rythme de leur pays. Il a déjà prévu de résider au village des athlètes, d’assister à la cérémonie d’ouverture et de suivre depuis les tribunes un maximum de compétitions. Jeudi 10 septembre, il portait au poignet le bracelet de la candidature de Paris aux JO de 2024. « J’habite Paris », explique-t-il très diplomatiquement.