— Publié le 24 novembre 2022

Face à la FIFA, l’Europe du foot passe à l’offensive

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Il s’y attendait, mais sans imaginer une telle ampleur au phénomène : pour avoir contraint sept sélections européennes à laisser aux vestiaires leur brassard « One Love », Gianni Infantino connaît un début Mondial 2022 très inconfortable. Le président de la FIFA est la cible de toutes les critiques depuis l’ouverture du tournoi. Elles viennent des fédérations, des joueurs, mais aussi des dirigeants politiques.

En tête de cortège, trois pays européens, dont deux ont débuté la compétition mercredi 23 novembre à Doha : l’Allemagne, le Danemark et la Belgique.

Les Allemands se sont montrés les plus audacieux dans leur campagne anti-FIFA. Pas vraiment une surprise avec une fédération dont le président, Bernd Neuendorf, a fait savoir depuis Doha qu’il ne soutiendrait pas Gianni Infantino lors de l’élection à la présidence, où il sera le seul candidat.

Au stade Khalifa, mercredi, les joueurs de la Mannschaft ont mis la main devant la bouche (photo ci-dessus), pour symboliser le silence imposé par la FIFA sur la question des droits humains, pour la photo d’équipe avant le coup d’envoi de leur match face au Japon.

A l’évidence, ils avaient préparé leur affaire. A l’entrée des deux équipes sur la pelouse, les commentateurs de la chaine ARD ont prévenu les téléspectateurs qu’il allait se passer quelque chose. Au même moment, mais en tribune officielle, la ministre allemande en charge des Sports, Nancy Faeser, a enfilé un brassard inclusif « One Love ». A sa droite, Gianni Infantino a retenu une grimace.

En parallèle, la Fédération allemande de football (DFB) a publié sur les réseaux sociaux un communiqué où elle répète que « les droits humains ne sont pas négociables« . Le texte insiste : « Nous interdire de porter le brassard, c’est nous interdire de parler. »

Au Danemark, le combat contre la FIFA est mené par le président de la fédération, Jesper Moller. Le dirigeant scandinave a suivi les pas de son homologue allemand pour annoncer qu’il ne soutiendrait pas, lui non plus, Gianni Infantino dans sa quête d’un troisième mandat à la présidence. « Il y a une élection présidentielle à la FIFA, a-t-il expliqué mercredi 23 novembre. Deux cent onze pays sont affiliés à la FIFA et j’ai cru comprendre que 207 soutenaient l’actuel président. Le Danemark n’en fait pas partie. Je ne suis pas seulement déçu, je suis en colère ».

Côté belge, la résistance au diktat de l’instance internationale du football remonte au plus haut sommet de l’Etat. Présente en tribune officielle pour le premier match de la Belgique, mercredi soir face au Canada, la ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, a porté elle aussi le brassard « One Love ». Elle l’arborait fièrement au moment de sa rencontre avec Gianni Infantino (photo-ci-dessous).

Plus tard, la ministre belge a posté sur sur compte Twitter une photo où elle porte le brassard au bras gauche. Avec ce commentaire : « Je suis de tout cœur avec nos Diables rouges ! »

L’affaire semble loin d’être terminée, sur le terrain comme en dehors. La Fédération néerlandaise de football (KNVB) a confié mercredi 23 novembre que les sept pays contraints de renoncer à porter le brassard – Angleterre, Pays de Galles, Belgique, Pays-Bas, Suisse, Allemagne et Danemark – étudiaient actuellement les recours juridiques possibles face à la FIFA.

« Nous examinons ensemble notre position juridique, a confié la KNVB. Nous soutenons à 100 % la campagne « OneLove » et son message… Nous poursuivons donc la campagne. » Mais l’instance néerlandaise a précisé qu’il n’était pas envisagé de porter l’affaire devant le Tribunal arbitral du sport (TAS).

Conséquence prévisible du feuilleton « One Love » au Mondial 2022 : les brassards inclusifs s’arrachent depuis quelques jours un peu partout dans le monde. L’agence Reuters rapporte que l’entreprise néerlandaise Badge Direct BV, qui les fabrique dans son usine d’Utrecht, est en rupture de stock depuis la fin de la semaine passée.

Son PDG, Roland Heerkens, explique en avoir expédié 10.000 exemplaires, dont un lot de 500 unités au Parlement européen.

Les brassards sont vendus 4,99 euros pièce, juste juste au-dessus du coût de fabrication. L’entreprise explique avoir lancé en urgence la production d’un nouveau lot de 10.000 exemplaires. Ils seront bientôt disponibles, notamment sur la boutique en ligne de la Fédération néerlandaise de football.