— Publié le 17 octobre 2016

Patrick Hickey, deux mois plus tard

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Son nom a quitté les colonnes des journaux. Mais il y reviendra. Lundi 17 octobre marque un sombre anniversaire pour Patrick Hickey: deux mois jour pour jour ont passé depuis l’arrestation du dirigeant irlandais dans sa chambre d’hôtel de Rio de Janeiro, au petit matin, par la police brésilienne. L’événement s’était produit le 17 août 2016.

Accusé d’être au centre d’un vaste trafic de billets olympiques, Patrick Hickey, 71 ans, a d’abord été incarcéré dans une prison de Rio. Puis la justice brésilienne a accepté, à la demande de ses avocats, de l’autoriser à séjourner dans un appartement privé, surveillé en permanence, dans le quartier très chic de Leblon. Selon la presse irlandaise, l’appartement serait payé par le comité olympique irlandais. Un privilège accordé pour « raisons médicales », l’Irlandais affichant une santé fragile. Mais son passeport est détenu par la justice brésilienne. Il ne peut pas quitter le Brésil. Il est également soumis à un couvre-feu fixé à 22 heures. Enfin, il doit se présenter devant la justice le 20 de chaque mois.

En deux mois, le dossier Patrick Hickey a peu évolué. L’Irlandais clame toujours innocence. Mais la date de son procès n’a pas été déterminée. Il ne semble pas y avoir non plus de feuille de route établie par la justice brésilienne. Patrick Hickey pourrait donc voir son séjour à Rio de Janeiro se prolonger encore plusieurs semaines, voire quelques mois. Dans tous les cas, il risque jusqu’à 7 années de prison.

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Depuis son arrestation, Patrick Hickey a renoncé à ses multiples casquettes dans le mouvement sportif. Il a abandonné la présidence du comité olympique irlandais, qu’il dirigeait sans interruption depuis 1989. Willie O’Brien, l’un des vice-présidents, en assure l’intérim. Il n’est plus officiellement membre du CIO. Et pourrait bien ne plus y revenir. Enfin, il a également rendu sa carte de président de l’Association des comités olympiques européens (EOC). Peu de chances de le voir se pointer à Doha, le mois prochain, à l’occasion de l’assemblée générale annuelle de l’Association des comités nationaux olympiques (ACNO).

En Irlande, l’affaire Patrick Hickey n’a pas été enterrée. Logique. La presse nationale continue à suivre le dossier de près. La quotidien Irish Times, notamment, révèle que le comité national olympique a missionné l’agence Deloitte pour mener un audit sur sa propre gouvernance. Une enquête interne censée déterminer les responsabilités de chacun dans un scandale aux contours nettement plus étendus que le seul bureau de Patrick Hickey. Preuve de la réalité du problème: ses conclusions étaient annoncées pour le mois d’octobre, elles ont été reportées au printemps prochain, avec un pré-rapport au mois de novembre 2017.

Déterminé à aller plus loin que les seuls faits de justice, le quotidien de Dublin a tenté de mieux cerner la personnalité et le fonctionnement de Patrick Hickey. Ses journalistes ont interrogé plusieurs acteurs du mouvement sportif national, athlètes, techniciens ou dirigeants. Il en ressort un portrait nuancé, où l’Irlandais apparaît souvent comme un despote, mais en même temps très impliqué dans le développement du sport et du mouvement sportif dans son pays.

Parmi les personnalités interrogées par l’Irish Times, le plus anti-Hickey se révèle être l’ex athlètes Eamonn Coghlan, 4ème sur 1500 m aux Jeux de Montréal en 1976, puis encore sur 5000 m aux Jeux de Moscou en 1980. L’ancien coureur de demi-fond explique avoir été victime des foudres de Patrick Hickey pour avoir pris position en faveur de son rival, Richard Burrows, lors des élections à la présidence du comité national olympique en 2001. « Il m’a publiquement critiqué, explique Eamonn Coghlan, avec ces mots: « Coghlan tu es un loser, tu as voté pour un loser, tu seras toujours un loser et tu n’as rien à faire avec le comité olympique aussi longtemps que je serai dans les parages. » Sympa.