
À l’heure où la durabilité et la sobriété sont érigées en valeurs cardinales des événements sportifs, la Coupe du monde de football 2026 sortira assurément du lot. Mais pas pour les bonnes raisons. La FIFA présente cette édition comme la plus inclusive jamais organisée. Fini le format à 32 équipes, place à une formule à 48 nations. L’Afrique fait partie des grandes bénéficiaires puisqu’elle pourra doubler son nombre de représentants (cinq jusqu’à présent). Tous les continents gagneront des places à la table du Mondial, ce qui fera mécaniquement augmenter le nombre de matchs : 104, contre 64 en 2022. Une réforme inclusive et lucrative, mais qui fera une grande victime : l’environnement.
Plus de 9 millions de tonnes de CO2
Le groupe Scientifiques pour une responsabilité globale (SGR) a passé le tournoi au crible et affirme sans détour que cette Coupe du monde est en passe de devenir « la plus néfaste de l’histoire pour l’environnement ». L’étude, réalisée en collaboration avec le Fonds de défense de l’environnement et le réseau Sport for Climate Action, souligne que la quantité de gaz à effet de serre émis dans le cadre de la compétition va presque doubler par rapport aux précédentes éditions. Le nombre accru de rencontres et la large zone à couvrir – le tournoi se déroulera entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique – s’accompagnera inévitablement d’un grand nombre de vols. Le transport aérien sera responsable de 7,72 millions de tonnes de CO2, soit 86% du bilan total et quatre fois plus que pour une Coupe du monde organisée entre 2010 et 2022.
Les scientifiques s’attendent à ce que ce Mondial produise autant de CO2 que 6,5 millions de voitures britanniques sur la route pendant une année entière. Avec 9,02 millions de tonnes de CO2 estimées, le tournoi dépasserait outrageusement les 5,25 millions de tonnes du Qatar en 2022. « Si l’on tient compte des émissions imputables aux contrats de sponsoring de la FIFA, l’impact climatique total des futures Coupes du monde augmente considérablement, précise le rapport. La FIFA a récemment conclu un partenariat commercial avec Aramco, la compagnie pétrolière publique d’Arabie saoudite, qui est la plus grande compagnie pétrolière de la planète en termes d’émissions historiques et actuelles. Les émissions induites par ce contrat de sponsoring sont estimées à environ 29,95 millions de tonnes de CO2. »
Le « rôle croissant » de la FIFA dans la crise climatique
Les auteurs, qui alertent également sur le risque de chaleur extrême pour les joueurs et les fans, appellent la FIFA à mettre fin aux partenariats commerciaux avec des entreprises très polluantes, limiter le nombre d’équipes engagées, établir des normes environnementales contraignantes et introduire de nouvelles mesures pour réduire les risques et l’exposition aux impacts climatiques.
« La FIFA doit assumer la responsabilité de son rôle croissant dans la crise climatique, affirme Stuart Parkinson, auteur principal du rapport. La Coupe du monde 2026 devrait être la plus polluante de tous les temps, et les prochains tournois devraient continuer à dépendre largement des voyages en avion et d’autres activités à forte émission de carbone. Alors que la crise climatique s’aggrave rapidement, la seule réponse sensée est que la FIFA prenne des mesures immédiates pour réduire considérablement les émissions des tournois. »
La FIFA s’est engagée à réduire ses émissions de 50 % d’ici à 2030 et à atteindre la neutralité d’ici 2040, mais nombre de ses décisions ne vont pas dans ce sens. Et il ne faudra pas non plus attendre que le changement vienne des Etats-Unis, Donald Trump n’ayant jamais caché son penchant climatosceptique.