— Publié le 11 février 2022

Kamila Valieva, une affaire qui patine

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Les médailles continuent de tomber comme les flocons sur un sommet alpin, aux Jeux de Pékin, au huitième jour de l’événement. L’Allemagne, la Norvège et l’Autriche en raflent le plus grand nombre. Paradoxe, les conversations sont pourtant dominées dans la bulle olympique par une cérémonie de podium qui devrait déjà avoir eu lieu, mais ne l’est toujours pas.

Trois jours après la date prévue, les médailles de l’épreuve par équipes de patinage artistique n’ont pas quitté leur boîte. La compétition a pris fin lundi dernier. Elle a été suivie à la patinoire par une remise de mascottes aux trois pays classés en tête, le Comité olympique de la Russie (ROC), les Etats-Unis et le Japon. Mais la cérémonie protocolaire de remises des médailles, prévue le lendemain, a été reportée. Les patineurs en ont été informés au moment où ils allaient s’y rendre. Depuis, elle est toujours en stand-by.

En cause, une « procédure légale« , explique le CIO. Elle concerne la Russe Kamila Valieva. La jeune patineuse, 15 ans, a été contrôlée positive en décembre dernier.

Que sait-on de l’affaire ? Quelles sont les parties concernées ? Quelle suite peut-elle avoir ? FrancsJeux fait le point sur un dossier devenu depuis deux jours le plus débattu des Jeux de Pékin, loin devant le cas Peng Shuai.

L’affaire. Mercredi 9 février, plusieurs médias étrangers, dont InsidetheGames, ont rapporté que la cérémonie des médailles avait été reportée en raison d’un cas de dopage dans l’équipe russe. Il a ensuite rapidement été dévoilé qu’il concernait une athlète mineure. Kamila Valieva, 15 ans, est la seule mineure de la délégation russe.

L’Agence internationale de contrôle (ITA), désormais en charge des tests de dopage au nom du CIO et des instances internationales, a précisé que le contrôle avait été effectué le 25 décembre dernier aux championnats de Russie à Saint-Pétersbourg. Son analyse a été conduite par le laboratoire de Stockholm, la Russie n’ayant plus l’autorisation de piloter elle-même ses opérations d’antidopage.

Selon le média russe RBC, Kamila Valieva a été contrôlée positive au trimetazidine. Placée depuis 2014 sur la liste des produits interdits, cette substance est notamment utilisée pour soigner les angines et les vertiges. A ce stade de l’affaire, la question de sa présence dans un échantillon prélevé sur une patineuse artistique âgée de 15 ans reste sans réponse.

Pour une raison encore obscure, le laboratoire de Stockholm a révélé le cas positif de la jeune Russe seulement mardi 8 février, au lendemain de l’épreuve par équipes des Jeux de Pékin. A quelques heures de la cérémonie des médailles.

La patineuse. Kamila Valieva n’est pas la première athlète venue. Championne de Russie et d’Europe en titre, elle s’est présentée aux Jeux de Pékin avec le statut de favorite pour la médaille d’or de l’épreuve individuelle. Depuis le début de la saison, elle a battu le record du monde des programmes court et libre. Malgré son jeune âge, elle illustre par ses qualités artistiques et son bagage technique ce qui se fait actuellement de mieux sur la glace.

Détail tout sauf anodin : Kamila Valieva est mineure. A ce titre, elle est considérée par l’Agence mondiale antidopage (AMA) comme une athlète « protégée« . En cas d’infraction aux règles antidopage, sa sanction pourrait être plus clémente. Son nom ne serait normalement pas rendu public.

Les parties prenantes. Elles se montrent toutes très avares de commentaires sur une affaire embarrassante pour les uns et les autres. Le CIO répète depuis deux jours par la voix de son porte-parole, Mark Adams, ne pas être en mesure de commenter le sujet, au moins pendant la « procédure légale » en cours. L’instance olympique se tourne également vers l’ITA, expliquant que les sujets dopage sont désormais de sa responsabilité.

Même absence de prise de position de la part de la Fédération internationale de patinage (ISU). Son communiqué très laconique explique qu’elle ne peut « divulguer aucune information sur une éventuelle violation des règles antidopage. Ceci est conforme aux règles antidopage de l’ISU et du CIO pour Pékin 2022« .

Quant à la Fédération russe de patinage, elle se borne à répéter par la voix de son attachée de presse que Kamila Valieva n’est pas suspendue. Elle pouvait donc participer à la compétition par équipes et poursuivre ses Jeux. Elle a été vue à la patinoire d’entraînement, ce vendredi matin, en tenue et sur la glace.

La suite. Il a été annoncé ce vendredi 11 février que le Tribunal arbitral du sport (TAS) tiendrait une audience en urgence à Pékin sur l’affaire Valieva. La juridiction a été saisie par l’ITA au nom du CIO. Mais elle pourrait se concentrer seulement sur la procédure juridique en cours, non pas sur l’aspect dopage. L’ITA l’a précisé dans un long communiqué : RUSADA avait imposé à la jeune patineuse une interdiction provisoire immédiate de participer aux Jeux de Pékin, mais elle a été contestée par Kamila Valieva, puis levée par décision de la commission d’appel de RUSADA.

Questions : Kamilia Valieva sera-t-elle disqualifiée de l’épreuve par équipes, et avec elle le reste de la formation du ROC ? Sera-t-elle autorisée à prendre part à la compétition individuelle ? Les réponses pourraient tomber dans les heures à venir.