Candidatures

En Australie, une pétition menace le projet olympique

— Publié le 3 février 2020

Gros nuages en vue dans le ciel du Queensland. La candidature de Brisbane et de sa région pour les Jeux d’été en 2032 ne doit pas seulement faire face à une solide opposition politique, conduite par le parti populiste One Nation. Elle pourrait bien être prochainement aussi l’objet d’un débat parlementaire.

Une pétition a été lancée officiellement en fin de semaine passée par Stephen Andrews, le seul parlementaire du Queensland issu du parti One Nation. Elle se veut radicale, puisqu’elle réclame l’annulation pure et simple de la candidature de Brisbane aux Jeux de 2032.

Ouverte en ligne vendredi soir, elle recensait dimanche 2 février en fin de journée plus de 2.400 signatures de résidents de l’état en âge de voter. Spectaculaire. Selon les textes, un minimum de 10.000 signataires est nécessaire pour forcer un débat parlementaire.

Au rythme où la consultation a démarré, l’objectif semble très réaliste. Les habitants du Queensland ont jusqu’au 30 mars 2020 pour signer le document.

Sans la moindre surprise, les opposants au projet olympique jouent sur la corde habituelle : l’argent. Ils brandissent l’argument du coût des Jeux. Ils suggèrent que les dépenses publiques seraient plus utiles à des causes moins « frivoles ».

« Ce n’est PAS le moment de faire de la frivolité et de la démagogie politique, alors que les rares fonds publics devraient être consacrés aux services essentiels et aux infrastructures à long terme qui apporteront des avantages économiques à tous et des emplois permanents, peut-on lire dans la pétition. Les citoyens tireront très peu de bénéfices de l’organisation des Jeux olympiques. La région du Queensland a encore été très touchée par les catastrophes naturelles et la sécheresse. Leurs conséquences sont très lourdes pour l’état tout entier. »

Menace réelle ou effet d’annonce ? A ce stade du processus, tout reste possible. Le parti One Nation ne manque pas de moyens. Il semble avoir ciblé la candidature olympique comme une arme de guerre pour déstabiliser le pouvoir en place dans le Queensland.

Au début de l’année, la sénatrice Pauline Hanson, actuelle leader de One Nation, a lancé les hostilités via une campagne d’affichage. Elle a déployé dans Brisbane et ses environs une cinquantaine de panneaux appelant le Queensland à dire non aux Jeux en 2032.

En face, dans le camp des porteurs du projet, le ton se veut distant, presque méprisant. La Première ministre du Queensland, Annastacia Palaszczuk, a qualifié la pétition de « non-sens ». La dirigeante politique peut s’appuyer sur un soutien solide. Le projet de candidature a déjà obtenu le feu vert du gouvernement fédéral. En décembre dernier, il a été approuvé par le parlement.

Annastacia Palaszczuk s’est rendue l’an passé à Lausanne, au siège du CIO. Accompagnée d’une délégation d’élus et de personnalités du monde sportif et économique, dont John Coates, l’un des membres australiens du CIO, elle a rencontré Thomas Bach. Dans le mouvement olympique, le projet du Queensland est souvent déjà présenté comme le grand favori de la course.

Selon les médis australiens, le comité de candidature pourrait prochainement accueillir deux figures du sport australien, l’ex athlète Cathy Freeman et la nageuse Cate Campbell. Elles pourraient être appelées à jouer un rôle majeur dans la campagne pour l’obtention des Jeux.

Mais les porteurs du projet ne peuvent pas se permettre de sous-estimer l’impact d’une opposition politique puissante et organisée. En 2017, une pétition lancée par un parti d’opposition a renvoyé par le fond les espoirs de la candidature de Budapest pour les Jeux d’été en 2024. Elle a été retirée de la course avant même la tenue d’un référendum, exigée par les anti-Jeux.

Paradoxe : le processus de réforme du mode de sélection des villes hôtes a été piloté par John Coates lui-même, à la demande de Thomas Bach. Selon ses nouvelles dispositions, les candidatures pourraient désormais devoir passer par l’étape référendum pour continuer leur parcours.