— Publié le 12 mars 2024

Deux événements dans le viseur de l’AMA

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Le paysage devient de plus en plus confus dans l’univers olympique. Il ne suffit plus, pour en avoir une vision claire, de faire le tri entre les athlètes et pays présumés propres et les plus douteux, soupçonnés d’entrave aux règles antidopage.

La tâche était déjà complexe, mais il faut désormais également savoir distinguer les événements crédibles et ceux nettement plus suspects. Les bons d’un côté, les mauvais de l’autre.

Réuni lundi à Lausanne, le comité exécutif de l’Agence mondiale antidopage (AMA) a exprimé sa « préoccupation persistante » et celle de ses membres, dont les représentants des athlètes, face à deux événements appartenant à la deuxième catégorie. Deux rendez-vous multisports que le mouvement olympique souhaiterait voir disparaître du calendrier avant même leur première édition.

Sans surprise, le premier est russe. Emboitant le pas du CIO, l’Agence mondiale antidopage avait déjà tapé sans ménagement sur le projet du Kremlin de dépoussiérer les Jeux mondiaux de l’Amitié, prévus en septembre prochain à Moscou et Yekaterinburg. En novembre dernier, son président, Witold Banka, avait lancé la première offensive. « Les soi-disant Jeux de l’Amitié en Russie ont été annoncés pour l’année prochaine. Nous voudrions lancer un avertissement, car nous avons de sérieux doutes quant aux perspectives en matière de lutte contre le dopage », avait prévenu le Polonais.

Le comité exécutif de l’AMA a relancé le débat, lundi 11 mars, en reprenant à peu près les mêmes doutes sur une initiative russe que le CIO condamne de toutes ses forces depuis l’annonce du projet, estimant sa motivation nettement plus politique que purement sportive. « Il est préoccupant que l’événement ne se déroulera pas sous la protection du Code mondial antidopage, insiste l’agence. L’AMA exhorte tous les signataires du Code à faire preuve de prudence et à ne pas légitimer cet événement, car l’Agence ne peut pas garantir le programme antidopage qui peut être en place ou non. »

Au passage, l’AMA en profite pour rappeler que l’agence russe antidopage, la RUSADA, ne se conforme toujours pas au code. Elle prévient qu’il n’existe actuellement aucun laboratoire accrédité par l’AMA en Russie, et que « la confiance globale dans le système antidopage russe reste faible. » Doux euphémisme.

Voilà pour la Russie et ses projets de briser son isolement en invitant le monde à disputer ses propres compétitions internationales. Mais le danger ne serait pas, selon l’AMA, réduit aux seules ambitions du Kremlin. Un autre événement est dans son viseur. Et pour cause, puisque son concept va à l’encontre de l’existence même de l’agence.

A Lausanne, lundi, les membres du comité exécutif ont « affirmé leur opposition aux « Enhanced Games », un événement qui encouragerait l’utilisation de médicaments améliorant la performance par les sportifs. » Ils l’ont « condamné à l’unanimité », qualifiant le concept de dangereux et irresponsable.

L’improbable initiative d’un homme d’affaires australien, Ayron D’Souza, fait couler beaucoup d’encre depuis son annonce en juin 2023. Initialement prévu cette année, mais repoussé à l’an prochain, le projet semble aussi fantaisiste que peu sérieux. Mais les millions de dollars promis par les organisateurs, et le caractère provocateur de l’événement, ne laissent personne indifférent.

L’ancien nageur australien James Magnussen a annoncé le mois dernier son intention de sortir de sa retraite pour tenter de battre, sans contrôle, le record du monde du 50 m. Une autre ex star de la natation australienne, Leisel Jones, a confié de son côté que, même si elle n’y participerait pas en raison des risques, elle était « intéressée » de découvrir à quelle vitesse un nageur pouvait aller avec l’aide du dopage

Pour l’AMA, le projet des « Enhanced Games » doit être combattu. L’agence va jusqu’à brandir les menaces de sanctions au visage des athlètes, et même des coachs, qui voudraient tenter l’aventure d’un sport sans règles ni limites.

L’AMA veut prendre les devants. Elle annonce « encourager les organisations antidopage du monde entier à tester les sportifs impliqués avant, pendant et après cet événement, afin de protéger l’intégrité du sport légitime. » Pas de blague.