— Publié le 15 juin 2023

Fatma Samoura, une menace écartée

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Une page va bientôt se tourner à la FIFA. La secrétaire générale de l’instance, la Sénégalaise Fatma Samoura (photo ci-dessus), va rendre les clefs de son bureau à Zurich. Elle quittera ses fonctions à la fin de l’année.

La FIFA l’a annoncé mercredi 14 juin dans un communiqué. La raison officielle : le désir de la numéro 2 de l’instance, entrée dans l’histoire comme la première femme – et la première non-Européenne – à accéder à une telle fonction, de consacrer « plus de temps à (sa) famille. » Agée de 60 ans, Fatma Samoura est mère de trois enfants.

L’annonce de sa démission était prévue pour la semaine prochaine, à l’occasion d’une réunion du Conseil de la FIFA. Mais Fatma Samoura a préféré anticiper, pour couper court aux rumeurs et spéculations annonçant son départ.

La FIFA n’a donné aucun détail sur sa succession au poste de secrétaire général, mais le nom du Suédois Mattias Grafström, l’actuel secrétaire général adjoint, est cité. Il coche plusieurs cases, dont la plus importante : sa proximité avec Gianni Infantino.

« Le football féminin aura atteint de nouveaux sommets sous son leadership », a suggéré l’instance dans un communiqué très élogieux sur les sept années passées par la Sénégalaise dans l’ombre souvent écrasante de Gianni Infantino.

« Rejoindre la FIFA a été la meilleure décision que j’ai prise dans ma vie, a commenté l’intéressée. Je suis heureuse d’avoir dirigé une équipe aussi diverse. Aujourd’hui, notre instance est mieux dirigée, plus ouverte, plus fiable et plus transparente. »‘

Voilà pour les bons mots, toujours très élégamment choisis en pareille circonstance. Mais ils n’éludent pas une question : pourquoi un tel départ ?

Retour en arrière. En 2016, avant son arrivée à la FIFA, le nom de Fatma Samoura était totalement inconnu dans le milieu du football. La Sénégalaise avait fait l’essentiel de sa carrière comme diplomate, aux Nations unies, en qualité de coordinatrice humanitaire dans plusieurs pays africains, dont Djibouti, le Cameroun, le Tchad, la Guinée, Madagascar et le Nigeria.

Selon plusieurs sources, son nom aurait été glissé aux oreilles de Gianni Infantino par Ahmad Ahmad, l’ancien président de la Confédération africaine de football (CAF), aujourd’hui tombé en disgrâce. L’ancien dirigeant malgache les aurait présentés lors d’un banquet organisé chez lui, à Antananarivo.

Quadrilingue, très éloignée des arcanes du football, donc supposée au-dessus des querelles, Fatma Samoura a été nommée à la FIFA en 2016, dans la foulée de l’élection de Gianni Infantino à la présidence. Aux plus sceptiques, prompts à assurer que son choix était avant tout « un coup de com », l’Italo-Suisse avait alors patiemment insisté sur « l’expérience et la vision internationales » de la dirigeante. Il l’avait justifié par la nécessité pour la FIFA de « s’ouvrir à des perspectives nouvelles, extérieures au réservoir traditionnel. »

Mais depuis ces derniers mois, le ticket Infantino/Samoura a perdu de sa brillance. En cause, les tensions à la CAF, où l’actuel président, le Sud-Africain Patrice Motsepe, peine à imposer son leadership malgré le soutien appuyé de Gianni Infantino.

Selon plusieurs sources, le président de la FIFA préparerait déjà le terrain pour son successeur. Il aurait même déniché le profil idéal, le Mauritanien Ahmed Yahya, un richissime homme d’affaires ayant construit sa fortune dans la pêche.

Mais la présidence de la CAF intéresse aussi Fatma Samoura. La Sénégalaise aurait même avancé ses pions, avec le projet de former un binôme avec son compatriote Augustin Senghor,  l’actuel président de la Fédération sénégalaise de football.

Problème : un tel attelage pourrait représenter un réel danger pour Gianni Infantino, et pour le pouvoir qu’il entend conserver sur le football africain. Fatma Samoura bientôt écartée de la FIFA, la menace s’éloigne.