— Publié le 1 décembre 2022

La Russie reste à la porte, le Kenya évite le pire

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Deux poids, deux mesures ? World Athletics a choisi la clémence envers l’athlétisme kényan, pourtant plombé par une saisissante succession de cas de dopage. Les Russes, eux, devront encore patienter avant d’entrevoir la fin d’une suspension décidée en novembre 2015.

Réuni pour deux jours à Rome, mardi 29 et mercredi 30 novembre, le Conseil de World Athletics était censé débattre de deux épais dossiers. Le premier affiche de sérieuses traces d’usure. Il concerne la Russie. Le second sent encore le neuf, mais il porte lui aussi les marques du dopage. Il est dédié au Kenya.

Sur la question russe, l’instance présidée par Sebastian Coe a repris à peu près les mêmes mots, et une conclusion identique, que ses réunions antérieures. Elle a repoussé à plus tard. Aucune décision n’a été prise cette semaine à Rome.

La réintégration de la Fédération russe d’athlétisme (RusAF), écartée depuis sept ans, pourrait être décidée en mars 2023. Le scénario reste très conditionnel. Il dépend de la taskforce formée par World Athletics pour surveiller et évaluer les progrès de la Russie sur la lutte contre le dopage. Elle doit présenter son rapport final en début d’année prochaine. Il pourrait être décisif dans la décision du Conseil de World Athletics.

Décisif pour une éventuelle réintégration de la fédération russe. Mais, l’instance internationale le précise en toutes lettres, pas pour la participation des athlètes russes aux compétitions internationales. La prochaine décision de son Conseil n’aura « aucun impact » sur la suspension des athlètes russes et biélorusses, décidée au début du conflit en Ukraine sur recommandation de la commission exécutive du CIO.

Sebastian Coe l’a expliqué à Rome : « La distinction est claire« . Saut retournement de situation, la Fédération russe d’athlétisme pourrait donc réintégrer la communauté internationale au printemps prochain, mais ses athlètes rester écartés des compétitions, à une année et quelques mois des Jeux de Paris 2024.

A en croire Rune Andersen, le patron de la taskforce de World Athletics, le scénario d’une réintégration de la RusAF en mars prochain serait assez réaliste. Le Norvégien met en avant un changement de culture et une « bonne gouvernance » au sein de la fédération russe, désormais présidée par l’ancienne sprinteuse Irina Privalova.

World Athletics le relève dans un communiqué : la RusAF prône la bonne parole de la lute antidopage via un vaste programme d’éducation dispensé à 13.000 jeunes athlètes dans le pays. Dans le même temps, l’instance a musclé son effort de contrôles, avec plus de 2000 tests d’athlètes russes par an, pour l’essentiel hors compétition.

A l’inverse, le dossier kényan a été refermé par le Conseil de World Athletics sans recours à la boîte à sanctions. A l’échelle du dopage, le pays présente pourtant un bilan sans égal sur la planète athlétisme : 45 athlètes ont été déclarés positifs au cours de l’année 2022, et une vingtaine d’autres cas seraient actuellement à l’étude. Costaud.

Mais la menace d’une suspension de la fédération, annoncée par les médias depuis la fin de la semaine passée, n’a pas été concrétisée à Rome par le Conseil de World Athletics. Le Kenya échappe au pire. Il le devrait à son ministre des Sports, Ababu Namwamba.

A la différence des dirigeants russes au début de la crise, l’homme politique kényan n’a pas cherché à nier les faits. Il reconnait l’existence d’un problème de dopage dans l’athlétisme national. Surtout, il a pris les devants en promettant à Sebastian Coe, avant même la réunion du Conseil, la mise en place d’un vaste plan antidopage généreusement financé par le gouvernement. Il prévoit un investissement de cinq millions de dollars par an, pendant les cinq prochaines années, pour remettre de l’ordre dans la maison et en chasser les tricheurs.

« L’Unité d’intégrité de l’athlétisme (AIU) continue de travailler main dans la main avec la fédération kényane, a expliqué Sebastian Coe mercredi à Rome. Le retour de la confiance dans le système sera long, mais tous les acteurs, locaux et internationaux, sont alignés pour résoudre ce problème. » Le coup est passé près.