— Publié le 2 août 2022

A Tokyo, un héritage olympique à l’odeur de corruption

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Curieux anniversaire. A l’heure où le Japon devrait analyser et mesurer l’héritage des Jeux de Tokyo 2020 (23 juillet au 8 août 2021), une année après l’événement, l’actualité post-olympique dans l’archipel continue d’être encombrée par les affaires.

Au centre du dossier, Haruyuki Takahashi (photo ci-dessus). L’ancien patron du groupe Dentsu, membre du conseil d’administration de l’ex comité d’organisation des Jeux de Tokyo (il a été dissous au mois de juin), est soupçonné de corruption. Il aurait touché par l’intermédiaire de son cabinet de conseil la somme de 45 millions de yens (environ 340.000 dollars), depuis l’année 2017 jusqu’au mois de juillet 2021, de l’un des nombreux sponsors des Jeux, la marque de costumes Aoki.

Les faits sont connus. Leur révélation remonte au mois dernier. La semaine passée, une perquisition a été effectuée à la demande du procureur au domicile de Haruyuki Takahashi. L’ancien président et fondateur de l’entreprise Aoki Holdings, Hironori Aoki, aujourd’hui à la retraite, a été lui aussi entendu par les enquêteurs. Son domicile a également fait l’objet d’une perquisition.

Haruyuki Takahashi ne nie pas avoir reçu via son cabinet de conseil la somme de 45 millions de yens. Mais il assure que ces paiements successifs n’avaient aucune relation directe avec les Jeux olympiques de Tokyo, ni avec sa qualité de membre du conseil d’administration de Tokyo 2020.

Aoki figurait depuis octobre 2018 parmi la longue liste des partenaires nationaux des Jeux de Tokyo 2020, au titre de supporteur officiel, le troisième niveau du programme national de marketing. En phase de candidature, la marque avait habillé la délégation de Tokyo 2020 à la session du CIO à Buenos Aires en septembre 2013, où la capitale japonaise avait décroché le pompon. Selon ses propres chiffres, Aoki aurait vendu plus de 30.000 costumes de sa collection aux couleurs de Tokyo 2020.

L’agence Kyodo News révèle aujourd’hui que les relations financières entre Aoki et Haruyuki Takahashi porteraient en réalité sur une somme nettement supérieure aux 45 millions de yens initialement évoqués. Citant plusieurs sources anonymes, l’agence japonaise explique que la marque de vêtements aurait également versé environ 230 millions de yens (1,7 million de dollars) à Haruyuki Takahashi dans le cadre de son programme de partenariat olympique.

L’ex dirigeant de Dentsu était censé en faire don à des athlètes ou groupes d’athlètes préparant les Jeux olympiques et paralympiques. Seul ennui, mais de taille : il en aurait conservé plus de la moitié (150 millions de yens).

Toujours selon Kyodo News, Aoki avait affecté la somme d’environ 500 millions de yens (3,8 millions de dollars au cours actuel) à son partenariat olympique, dont la moitié devait être allouée aux athlètes. Cette dernière opération a été réalisée via un responsable de Dentsu, la plus grande agence de publicité au Japon, très impliquée auprès du comité d’organisation des Jeux. Les fonds ont été transférés au cabinet de conseil de Haruyuki Takahashi via une société affiliée à Dentsu.

Dans le cadre de cette opération, un dîner aurait réuni dans un restaurant de Tokyo Hironori Aoki, le fondateur et président d’Aoki, et Haruyuki Takahashi. Le premier des deux hommes aurait remis au second un courrier contenant toutes les demandes de l’entreprise liées aux Jeux olympiques. Haruyuki Takahashi a déclaré aux enquêteurs que la lettre n’avait rien à voir avec les Jeux olympiques, mais qu’il l’avait détruite.