— Publié le 10 février 2016

« Le cyclisme doit agir, il doit agir très vite »

Institutions Focus

Sale temps pour le cyclisme. Samedi 30 janvier 2016, un cas de tricherie mécanique a été découvert aux championnats du monde de cyclo-cross, disputés en Belgique. Le premier du genre. Le vélo de la Belge Femke van Den Driessche, favorite de l’épreuve réservée aux moins de 23 ans, était équipé d’un moteur. L’UCI a immédiatement confirmé les faits, évoquant ouvertement un cas de dopage technologique. Puis son président, le Britannique Brian Cookson, a assuré mardi 9 février à Doha, en marge du Tour du Qatar, qu’il pourrait devenir « nécessaire » de contrôler de façon individuelle tous les vélos de tous les coureurs, sur toutes les courses.

Président de l’Union européenne de cyclisme (UEC), le Français David Lappartient ne croit pas à une fraude mécanique de grande ampleur, comme a pu l’être le dopage pharmaceutique dans le peloton professionnel. Mais il appelle les instances internationales, en priorité l’UCI, à agir vite et fort. Il l’a expliqué à FrancsJeux.

FrancsJeux: Quelle a été votre réaction en apprenant qu’une cycliste belge avait participé aux Mondiaux de cyclo-cross avec un vélo équipé d’un moteur?

David Lappartient: J’en ai été abasourdi. Nous savions que ce genre de tricheries existait, mais je n’aurais jamais imaginé voir une telle affaire à des championnats du monde, avec les contrôles réalisés sur la mécanique à ce niveau de compétition. Les bras m’en sont tombés.

Cette affaire révèle-t-elle que, comme pour le dopage, les tricheurs sont en avance sur les contrôles?

Non. Les contrôles existent. Il est d’ailleurs étonnant que, sachant cela, une athlète ait été prise avec un équipement de l’ancienne génération.

Le dopage technologique serait donc aujourd’hui plus avancé?

Si j’en crois ce que j’ai pu lire ou entendre, la tricherie se nicherait aujourd’hui dans les roues. Mais, encore une fois, les contrôles existent. L’UCI possède aujourd’hui des moyens très avancés pour détecter tout cela, grâce à des champs magnétiques et des mesures de chaleur.

La fraude mécanique est-elle aujourd’hui très présente dans le cyclisme professionnel?

Je ne crois pas. Si elle existe, elle reste marginale. Nous avons vu des choses étranges dans un passé récent, quatre ou cinq ans en arrière, mais aujourd’hui je n’ose pas croire que les tricheurs soient nombreux. Un travail important est réalisé par l’UCI pour empêcher la tricherie.

En début de semaine, l’Union européenne de cyclisme a pourtant publié un communiqué appelant à plus de contrôles technologiques…

En effet. Nous devons en faire, peut-être même en plus grand nombre que ce qui est réalisé actuellement. Notre sport se relève à peine d’une période très difficile. L’UCI, l’AMA et les agences nationales antidopage ont accompli un travail exceptionnel. Le dopage a fortement reculé. Aujourd’hui, nous assistons à du véritable sport. Mais nous ne pouvons pas nous permettre de voir des affaires de tricherie mécanique risquer d’anéantir tout cela et laisser penser au public que les cyclistes sont incurables.

Que proposez-vous?

Le cyclisme doit agir. Et il doit agir vite. Il faudra sans doute intensifier les contrôles pour montrer aux tricheurs qu’il existe, dans les instances, une volonté de détecter toutes les possibles fraudes. Il est beaucoup plus facile de trouver un matériel trafiqué que de déceler le dopage de la dernière génération.

Pourquoi manifester une telle urgence à agir après un seul cas de dopage technologique?

La réponse est dans les médias. Depuis cette affaire, les journaux, radios, télévisions et sites internet ne parlent que de cela. J’ai assisté dernièrement à un repas d’anciens dans la commune dont je suis le maire. La conversation tournait autour de cette affaire. Dix années sont parfois nécessaires pour retrouver une crédibilité, mais il suffit souvent de 5 minutes pour la perdre. Nous avons les outils pour lutter contre la triche mécanique, utilisons-les.