— Publié le 24 juillet 2016

Décision de la commission exécutive du CIO concernant la participation des athlètes russes aux Jeux de Rio

Communiqué

La commission exécutive du CIO a examiné aujourd’hui la question de la participation des athlètes russes aux Jeux Olympiques de Rio 2016. Dans ses délibérations, la commission exécutive a été guidée par une règle fondamentale de la Charte olympique, à savoir protéger les athlètes intègres et la probité du sport.

Les discussions ont porté sur le rapport d’enquête indépendante de l’Agence Mondiale Antidopage (AMA) rédigé par le professeur Richard McLaren, la décision du Tribunal Arbitral du Sport (TAS) du 21 juillet 2016 concernant les règles de l’Association internationale des fédérations d’athlétisme (IAAF) et la participation des athlètes russes aux compétitions d’athlétisme régies par l’IAAF, ainsi que la Charte olympique et le Code mondial antidopage.

Compte tenu de l’urgence de la situation, les Jeux Olympiques de Rio 2016 commençant dans 12 jours et le processus d’inscription des athlètes étant déjà en cours, la commission exécutive du CIO se devait de prendre une décision préliminaire quant à la participation des athlètes russes à Rio de Janeiro. Le Prof. McLaren déclare dans son rapport que celui-ci « remplit partiellement le mandat de la personne indépendante ». C’est pourquoi le CIO est favorable à sa demande de poursuivre son travail pour le finaliser. D’un autre côté, cette situation présente un caractère d’urgence pour le CIO dans la mesure où il ne reste plus assez de temps pour que le CIO fasse procéder aux auditions des athlètes, officiels et organisations concernés.

La commission exécutive du CIO a donné au Comité National Olympique russe (ROC) la possibilité de venir plaider sa cause et celle des athlètes russes. C’est M. Alexander Zhukov, président du Comité Olympique Russe, qui est venu le faire au début de la conférence téléphonique tenue par la commission exécutive, qu’il a quittée immédiatement après sa présentation.

Durant son intervention, M. Zhukov a expliqué que la Fédération de Russie et le ROC s’engageaient à coopérer pleinement avec toutes les organisations internationales afin de faire la lumière sur tous les éléments de ce dossier. Il a également donné l’assurance que le ROC allait opérer une vaste et complète restructuration du système russe de lutte contre le dopage. À ce propos, il a souligné que le ROC était attaché au sport propre et qu’il œuvrerait pour un sport propre en Russie.

M. Zhukov a en outre déclaré que tous les athlètes russes sélectionnés pour les Jeux Olympiques de Rio 2016 ont été contrôlés au cours des six derniers mois par des agences antidopage étrangères. Les échantillons ont été prélevés par des officiers de contrôle du dopage étrangers et analysés dans des laboratoires étrangers. Les athlètes russes qui ont participé aux différentes compétitions dans tous les sports ont fait l’objet de plus de 3.000 contrôles de dopage. Les résultats se sont révélés négatifs dans leur grande majorité.

La commission exécutive du CIO a discuté de la position à adopter face au ROC. À ce propos, elle a relevé que le rapport d’enquête indépendante ne tirait aucune conclusion à l’encontre du ROC en tant qu’institution.

La commission exécutive du CIO a par ailleurs pris note d’une lettre datée du 23 juillet 2016 adressée par la Fédération internationale de tir sportif (ISSF). Dans cette lettre, l’ISSF confirme avoir reçu de l’AMA des informations sur les trois « échantillons escamotés » concernant le tir. L’ISSF indique que ces trois échantillons, au moment où les résultats d’analyse avaient été communiqués, avaient été enregistrés comme positifs dans le système de gestion des résultats ADAMS de l’AMA, et que toutes les procédures de gestion des résultats ont déjà été suivies.

Sur la base des conclusions du rapport d’enquête indépendante, tous les athlètes russes souhaitant participer aux Jeux Olympiques de Rio 2016 sont considérés comme étant touchés par un système visant à détourner et manipuler les procédures antidopage. Le rapport d’enquête indique qu’en raison « du délai extrêmement serré », la personne indépendante n’a « pu que survoler la masse de données disponibles ». La commission exécutive du CIO est donc parvenue à la conclusion que cette vue du problème ne pouvait se restreindre aux athlètes des 20 sports olympiques d’été mentionnés dans le rapport d’enquête.

Dans ces circonstances exceptionnelles, les athlètes russes de chacun des 28 sports olympiques d’été doivent assumer les conséquences de ce qui équivaut à une responsabilité collective afin de sauvegarder la crédibilité des compétitions olympiques; la « présomption d’innocence » ne peut donc leur être appliquée dans ce cas. D’un autre côté, en vertu des principes de justice naturelle, le droit à la justice individuelle, auquel tout être humain peut prétendre, doit être appliqué. Cela signifie que chaque athlète concerné doit se voir offrir la possibilité de réfuter l’applicabilité de la responsabilité collective à son cas personnel.

Après délibération, la commission exécutive a décidé de ce qui suit :

1. Le CIO n’acceptera aucune inscription d’un athlète russe aux Jeux Olympiques de Rio 2016 à moins que l’athlète concerné ne puisse réunir les conditions énoncées ci-après :

2. L’inscription ne sera acceptée par le CIO que si un athlète peut apporter des preuves satisfaisant totalement sa Fédération Internationale (FI) quant aux critères qui suivent :

Les FI*, en établissant leur contingent d’athlètes russes admissibles, se référeront aux exigences du Code mondial antidopage et aux autres principes convenus lors du Sommet olympique du 21 juin dernier. En particulier :

• L’absence de contrôle antidopage positif au niveau national ne peut pas être considéré comme suffisant par les FI.

• Les FI devront procéder à une analyse du dossier antidopage de chaque athlète, en tenant compte uniquement des contrôles appropriés et fiables effectués au niveau international, des spécificités de son sport et des règles de ce dernier, afin de garantir des conditions de compétition équitables pour tous.

• Les FI examineront les informations contenues dans le rapport d’enquête indépendante et à cet égard chercheront à obtenir de l’AMA les noms des athlètes et des fédérations nationales impliqués. Aucune personne, athlète ou officiel ni aucune fédération nationale impliqués ne pourront être autorisés à participer ou recevoir une accréditation aux Jeux Olympiques.

• Les FI devront également appliquer leurs règlements respectifs quant aux sanctions à infliger à des fédérations nationales entières.

3. Le ROC n’est pas autorisé à inscrire aux Jeux Olympiques de Rio 2016 un athlète qui aura déjà été sanctionné pour dopage, même s’il a purgé la sanction prononcée à son encontre.

4. Le CIO n’acceptera d’inscription de la part du ROC que si la FI de l’athlète est satisfaite des preuves apportées quant aux conditions 2 et 3 susmentionnées et si cette inscription est confirmée par un expert de la liste des arbitres du TAS nommé par un membre du Conseil International de l’Arbitrage en matière de Sport (CIAS), indépendant de toute organisation sportive associée aux Jeux Olympiques de Rio 2016.

5. L’inscription de tout athlète russe accepté en définitive par le CIO sera subordonnée à un programme rigoureux de contrôles hors compétition supplémentaires menés en coordination avec la FI correspondante et l’AMA. Toute indisponibilité d’un athlète pour les contrôles effectués dans le cadre de ce programme aboutira au retrait immédiat de son accréditation par le CIO.

En plus des décisions susmentionnées, la commission exécutive du CIO a réaffirmé les mesures provisoires prises le 19 juillet 2016. Celles-ci s’appliqueront jusqu’au 31 décembre 2016 et seront réexaminées par la commission exécutive en décembre 2016.

Des sanctions et mesures supplémentaires pourront être imposées par le CIO après la publication du rapport final d’enquête indépendante et à l’issue de la procédure légale appropriée engagée par la commission exécutive du CIO ainsi que par sa commission disciplinaire constituée le 19 juillet 2016, placée sous la présidence de M. Guy Canivet (vice-président de la commission d’éthique du CIO, ancien membre de la Cour constitutionnelle française et ancien premier président de la Cour de cassation).

La commission exécutive du CIO réaffirme ses vives inquiétudes quant aux failles évidentes de la lutte contre le dopage. Le CIO réitère une fois encore son appel lancé à l’AMA à revoir complètement son système antidopage. Le CIO contribuera à cette révision en proposant des mesures visant à mieux définir les responsabilités, renforcer la transparence, établir de meilleures procédures de surveillance et accroître l’indépendance.

* L’IAAF a déjà établi son contingent d’athlètes russes admissibles.

II.

La commission exécutive du CIO a par ailleurs examiné plus avant la demande de l’athlète russe Iuliia Stepanova (athlétisme) de concourir aux Jeux Olympiques de Rio 2016 en tant « qu’athlète neutre ». Étant donné que Mme Stepanova a refusé de participer aux compétitions en tant que membre de la délégation du ROC, la commission exécutive du CIO devait examiner s’il était possible et approprié de faire une exception aux règles de la Charte olympique. Cette demande revêtant des aspects éthiques d’importance, la commission exécutive du CIO a demandé son avis à la commission d’éthique, laquelle a entendu Mme Stepanova ainsi que des représentants de l’IAAF et du ROC.

Mme Stepanova fonde sa demande sur son rôle de « lanceur d’alerte » s’agissant de la manipulation du système antidopage et de la corruption impliquant le laboratoire antidopage de Moscou accrédité par l’AMA, la Fédération russe d’athlétisme et l’IAAF. La commission d’éthique salue la contribution de Mme Stepanova à la lutte contre le dopage. Elle l’a examinée à la lumière de son implication de longue date, au moins cinq ans, dans ce système de dopage et au regard du moment choisi pour devenir lanceur d’alerte, lequel est intervenu une fois que ledit système ne l’a plus protégée suite à un contrôle positif pour lequel elle a été sanctionnée pour dopage.

Après une évaluation minutieuse des arguments avancés, la commission d’éthique a émis l’avis suivant à l’intention de la commission exécutive du CIO :

« S’il est exact que le témoignage et les déclarations publiques de Mme Stepanova ont apporté une contribution à la protection et à la promotion des athlètes propres, au fair-play, à l’intégrité et à l’authenticité du sport, les dispositions impératives de la Charte olympique relatives à l’organisation des Jeux Olympiques s’opposent à la reconnaissance d’un statut d’athlète neutre. De plus, la sanction dont Mme Stepanova a fait l’objet ainsi que les circonstances dans lesquelles elle a dénoncé les pratiques de dopage, qu’elle a elle-même utilisées, ne satisfont pas aux exigences éthiques pour qu’un athlète participe aux Jeux Olympiques.

La commission exécutive du CIO a suivi l’avis de sa commission d’éthique, prenant également en considération la décision susmentionnée de ne pas autoriser un athlète russe qui a déjà été sanctionné pour fait de dopage à participer aux Jeux Olympiques de Rio 2016. Par conséquent, le CIO n’inscrira pas Mme Stepanova en tant que concurrente aux Jeux Olympiques de Rio 2016.

Toutefois, la commission exécutive du CIO souhaiterait exprimer sa reconnaissance à Mme Stepanova pour sa contribution à la lutte contre le dopage et à l’intégrité du sport. Aussi le CIO invite-t-il Mme Stepanova et son mari aux Jeux Olympiques de Rio 2016. De plus, le CIO est prêt à soutenir Mme Stepanova afin qu’elle poursuive sa carrière sportive et qu’elle puisse éventuellement rejoindre un autre Comité National Olympique.