— Publié le 16 novembre 2025

La transparence et l'intégrité de l'ESC pointées du doigt

Tir

La Confédération européenne de tir (ESC) a réélu Alexander Ratner à sa tête lors de l’Assemblée générale organisée à Yerevan le 25 octobre. Le dirigeant russe a donc démarré un deuxième mandat de président, qui courra jusqu’en 2029. L’autre candidate à cette élection, Karoliina Nissinen, a cependant émis de vives critiques au sujet du déroulement de la campagne et du scrutin.

« Tout au long de la campagne présidentielle, tous les canaux de communication officiels de l’ESC ont apparemment été utilisés exclusivement pour promouvoir la candidature de M. Ratner. Les informations concernant ma campagne ont été complètement bloquées. Mon nom n’a même pas été mentionné dans les annonces officielles relatives à l’élection », écritelle dans une lettre consultée par Francs Jeux. Deux jours avant le vote, un article consacré au programme d’Alexander Ratner a en effet été publié sur le site de l’ESC, mais aucun contenu similaire n’a été publié pour présenter les propositions de l’autre candidate, ni dans les jours, ni dans les semaines qui ont précédé l’Assemblée générale.

« Plusieurs fédérations membres qui avaient ouvertement exprimé leur soutien à ma candidature ont signalé des difficultés pour accéder au système de vote en ligne, tandis que d’autres, alignées sur la position russe, ne semblaient pas rencontrer de tels obstacles. D’autres éléments suggèrent qu’il y a eu une action coordonnée pour assurer l’élection de M. Ratner, poursuit Karoliina Nissinen, une figure respectée dans le monde du tir sportif, qui dirige l’ISSF Academy. Le moment le plus choquant s’est produit juste avant le vote. Selon plusieurs délégués prêts à témoigner, le président sortant, M. Ratner, a publiquement promis 200.000 euros à chaque fédération membre, soit un total de plus de 23 millions d’euros. »

Un argent qui proviendrait du businessman Vladimir Lisin, accessoirement vice-président du Comité olympique russe. « La gouvernance et la gestion financière de l’ESC manquent de transparence et de responsabilité. Personne ne sait où vont réellement les millions d’euros que M. Ratner prétend provenir de son bienfaiteur russe. Personne n’a vu ces fonds, et aucun accord de parrainage officiel n’a jamais été communiqué aux fédérations membres pour confirmer l’existence ou l’objet de ces revenus », dénonce la candidate battue 56 voix à 37.

« Ce qui s’est passé ne concerne pas seulement une élection, estime-t-elle. Il s’agit de savoir si le sport européen restera indépendant et éthique, ou s’il sera acheté et contrôlé par des intérêts liés à un État actuellement suspendu des compétitions internationales en raison de la guerre en Ukraine. Cela semble s’inscrire dans le cadre d’un effort plus large des intérêts russes pour regagner leur influence sur les fédérations sportives internationales et revenir aux Jeux olympiques grâce à leur pouvoir financier plutôt qu’à une réforme et une participation légitimes. C’est pourquoi j’appelle publiquement et de toute urgence le CIO et l’ISSF à enquêter de manière approfondie et transparente sur cette affaire. »

Elle se dit prête à témoigner, comme d’autres délégués, et à fournir des preuves. Contactée, l’ISSF n’a pas répondu à nos sollicitations.