Vice-champion olympique à Athènes et multiple champion du monde, Gennadiy Golovkin remonte sur le ring. Cette fois, il ne vise pas une médaille, mais la présidence de World Boxing. Celui qui est l’actuel président du CNO du Kazakhstan sera en concurrence avec le Grec Mariolis Charilaos le 23 novembre, à Rome, lors du congrès de la fédération internationale. Il présente son projet pour Francs Jeux.
Vous avez tout accompli sur le ring. Pourquoi vous présenter à la présidence de World Boxing maintenant ?
La réponse est simple : la boxe risquait de perdre son statut olympique et je ne pouvais pas rester les bras croisés et laisser cela se produire. Il arrive un moment où l’on se rend compte que ce ne sont plus les médailles qui comptent le plus, mais ce que l’on peut faire pour ce sport. J’ai commencé dans une petite salle de sport au Kazakhstan, j’ai gravi tous les échelons de ce sport et j’ai vu ce que vivent les athlètes, le bon comme le mauvais. La boxe m’a donné une vie, mais j’ai aussi vu à quel point cette vie peut être fragile lorsque le système qui l’entoure échoue. Aujourd’hui, je veux mettre à profit ce que j’ai appris pour rendre les choses un peu plus justes, un peu plus honnêtes, étape par étape.
Votre nom figure parmi les candidats au poste de président, mais aussi pour ceux de vice-président et de membre du conseil d’administration. Pourquoi ce choix ?
Parce que je souhaite vraiment apporter ma contribution au monde de la boxe. J’espère être élu président mais si ce n’est pas le cas, je veux contribuer différemment au sein de World Boxing.
Que vous apporte votre expérience d’athlète aujourd’hui en tant que dirigeant ?
J’ai boxé chez les amateurs et chez les professionnels. Cela fait plus de 30 ans que je suis engagé dans ce sport. J’ai commencé dans une petite ville et j’ai accédé aux plus grands rings. J’ai vécu l’incertitude, les sacrifices, les moments de fierté, la pression liée à la compétition. Je n’ai pas besoin que quelqu’un m’explique ce que l’on ressent, je le sais par expérience. Je connais la réalité quotidienne des athlètes qui s’entraînent dur, je ne perdrai jamais de vue la raison pour laquelle nous sommes ici.
Quelles sont vos priorités ?
En premier lieu, ce sont les athlètes : il faut les écouter, les protéger. Ensuite, c’est la transparence dans la manière dont la fédération travaille. Le but est de renforcer la boxe en vue des prochains Jeux olympiques. Beaucoup de choses ont été faites pour maintenir la boxe au programme olympique depuis deux ans. Nous devons mener un audit pour cibler nos points forts, nos points faibles et les domaines où il faut agir immédiatement. Cela implique une communication ouverte, ainsi que la participation des athlètes et de voix indépendantes.
Dans votre lettre de motivation, vous dîtes que vous souhaitez que World Boxing innove. Comment ?
L’innovation doit être responsable, progressive et toujours protéger l’aspect humain. Le CIO nous rappelle que la technologie doit être au service des athlètes et de l’intégrité, et non remplacer les personnes. Pour nous, l’innovation signifie des outils pratiques qui rendent le sport plus clair, plus sûr et plus facile à comprendre, tant pour les athlètes que pour les officiels et les fans. Nous commencerons par déterminer dans quels domaines la technologie peut véritablement apporter une valeur ajoutée : dans l’éducation, dans la transparence du jugement, en aidant les arbitres à prendre les bonnes décisions, ou dans la protection du bien-être des athlètes. Nous ferons des tests.
Le CIO a affiché un intérêt clair pour les événements mixtes. C’est envisageable en boxe ?
Pourquoi pas. Les épreuves mixtes constituent une évolution intéressante dans le Mouvement olympique. La boxe jouit d’une longue tradition olympique et pour nous, il est important de ne pas apporter de changements symboliques, mais de veiller à ce que tout nouveau format protège véritablement les athlètes et respecte l’intégrité de la compétition. Cela dit, nous restons ouverts à l’innovation, à condition qu’elle s’appuie sur une évaluation appropriée de la faisabilité et de la sécurité, une consultation des athlètes et une mise en conformité avec les normes olympiques. Si, à l’avenir, un tel concept peut renforcer l’inclusion et l’équité sans compromettre la sécurité, on l’étudiera.
Vous ressentez une pression liée au futur olympique de la boxe ?
Nous savons qu’il faut convaincre le CIO et pour ça, il faut présenter des résultats concrets. La boxe fait partie de l’histoire olympique depuis plus d’un siècle, elle reflète les valeurs fondamentales du mouvement olympique : courage, respect et discipline. Mais comme le rappelle souvent le CIO, aucun sport n’a sa place garantie. Chacun doit continuer à la mériter en protégeant les athlètes, en garantissant l’équilibre entre les genres et en fonctionnant de manière transparente. Pour la boxe, cela signifie faire preuve d’intégrité à tous les niveaux, de l’arbitrage à la gouvernance. Je suis convaincu que si nous respectons ces normes de manière cohérente, la boxe restera non seulement au programme olympique, mais renforcera également son rôle au sein de celui-ci.
Cette année, World Boxing a mis en place une politique de tests de genre, qui a posé certains problèmes pour une partie des athlètes. Quel regard portez-vous sur cette approche ?
Il s’agit d’un sujet très délicat, qui doit toujours être abordé avec respect, équité et responsabilité scientifique. La boxe est un sport de combat à contact direct, c’est pourquoi il est essentiel de disposer de critères d’éligibilité clairs et cohérents, avant tout pour protéger la sécurité, l’équité et le bien-être des athlètes sur le ring. World Boxing suit et continuera de suivre les directives du CIO, des commissions médicales et éthiques compétentes et des normes internationales en matière de droits de l’homme. La dignité et la vie privée de chaque athlète doivent être respectées à tout moment, et tout processus doit être traité individuellement, de manière confidentielle et conformément aux protocoles médicaux reconnus. Notre responsabilité est de veiller à ce que les critères de participation soient transparents, fondés sur des données scientifiques et appliqués de manière cohérente, afin que chaque athlète qui monte sur le ring puisse concourir en toute sécurité et dans des conditions équitables.

