
Les Enhanced Games se sont dévoilés le 21 mai, en donnant rendez-vous à Las Vegas en mai 2026. Pendant que ses créateurs se gargarisent du « record du monde » de Kristian Gkolomeev sur 50 m nage libre et de la préparation du triple médaillé olympique James Magnussen, le monde du sport a largement exprimé son rejet de ce projet, où les produits dopants sont autorisés, au nom de la performance. Une question d’image, mais aussi de valeurs.
« Une trahison de tout ce que nous défendons »
Le 10 juin, avant l’ouverture du Forum international des athlètes à Lausanne, les commissions des athlètes du CIO et de l’Agence mondiale antidopage ont publié un communiqué conjoint pour manifester leur opposition à cette compétition. « En tant qu’athlètes, nous croyons que les Enhanced Games ou tout événement encourageant l’usage de substances et de méthodes améliorant les performances sont une trahison de tout ce que nous défendons. Surtout, ces événements compromettent l’intégrité du sport et la responsabilités que les athlètes tiennent en tant que modèles dans la société, écrivent-ils alors. Promouvoir des substances et des méthodes améliorant les performances envoie un message dangereux – surtout aux générations d’athlètes actuelle et future. »
Statement from the IOC and WADA Athletes Commissions on the Enhanced Games, ahead of the International Athletes Forum in Lausanne on 11-12 June. @Athlete365 @wada_ama pic.twitter.com/kORgeTQcwX
— IOC MEDIA (@iocmedia) June 10, 2025
Alertant sur les « conséquences graves à long terme » pour la santé des athlètes, ils dénoncent un principe « totalement irresponsable et immoral », opposé aux « valeurs de fair-play, d’éthique et de respect qui devraient guider et inspirer la prochaine génération d’athlètes ». La Fédération internationale d’haltérophilie (IWF), dont le sport sera au programme de la première édition, comme la natation et l’athlétisme, a montré du doigt le danger pour la santé des athlètes et l’intégrité du sport dans un communiqué, alors que World Aquatics a annoncé que les nageurs qui participeraient aux Enhanced Games ne seraient plus autorisés à prendre part aux compétitions qu’elle régit. Les barbelés sont installés, mais les « Enhanceurs » n’ont pas pour autant renoncé. Bien au contraire.
« Le véritable danger pour le sport n’est pas la science, c’est la stagnation »
Aron D’Souza, président et fondateur des Enhanced Games, a répondu à ces critiques le 4 juin : « Nous sommes aux côtés des athlètes, toujours. Aux Enhanced Games, les athlètes ont ce que les fédérations traditionnelles ne leur ont jamais donné : le choix, l’équité et de l’argent réel. » Gkolomeev ne dira pas le contraire : « Un million de dollars, c’est dix fois plus que ce que j’ai gagné en dix ans. » Lui aussi motivé par la promesse d’un chèque XXL en cas de record du monde, Magnussen a commencé sa cure de peptides et d’hormones et a pris 20 kilos. « Après quelques mois de préparation, je ressemblais plus à un bodybuilder qu’à un nageur », admettait le nageur australien. « Ce ne sont plus des traitements de grand-papa, avec les bons vieux stéroïdes anabolisants, mais les effets délétères pour la santé sont les mêmes, souligne Olivier Rabin, directeur scientifique de l’AMA, dans les colonnes de L’Equipe. Le cas de Magnussen est inquiétant car il prouve qu’ils essayent des choses sans savoir si cela va fonctionner. Ils utilisent l’athlète comme un cobaye. »
« Nous offrons une arène médicalement supervisée, axée sur la sécurité et basée sur la science – où la performance est récompensée, et non contrôlée par une idéologie dépassée, rétorque D’Souza, pour qui World Aquatics cherche avant tout à protéger un monopole. World Aquatics n’a pas payé ses athlètes pendant des décennies. Aujourd’hui, face à une concurrence réelle et à un réel élan, elle s’en remet aux menaces et aux tactiques d’intimidation. Soyons clairs : le véritable danger pour le sport n’est pas la science. C’est la stagnation. » Contre laquelle il prétend donc lutter avec les stéroïdes anabolisants, la testostérone ou l’EPO. « Le programme Apollo a prouvé que l’espèce humaine pouvait dépasser ses limites grâce à la science et à la technologie. C’est aussi à cela qu’aspirent les Enhanced Games », ose-t-il carrément. Malgré l’appui d’investisseurs privés, pour l’heure, les soutiens sportifs et les sponsors ne se bousculent pas encore.