— Publié le 15 octobre 2025

Renouer avec Sonic, « un bon coup marketing » pour le CIO

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Le célèbre hérisson bleu est dans les starting blocks. Le CIO et SEGA CORPORATION ont annoncé la signature d’un nouvel accord de licence le 6 octobre. « Un programme de merchandising en co-branding mettant en vedette Sonic et les anneaux olympiques » sera ainsi mis en place et dès 2026, une gamme de produits dérivés sera mise sur le marché. L’objectif est clair pour Elisabeth Allaman, directrice générale adjointe des services de télévision et de marketing du CIO : « séduire un public international » en permettant « aux fans de tout âge de découvrir l’esprit du sport et du jeu sous un nouveau jour ».

Un come-back fracassant au cinéma

Sonic n’est pas étranger à l’univers olympique. Le jeu vidéo Mario et Sonic aux Jeux olympiques, lancé en 2007 dans la perspective de Pékin 2008, s’était vendu à plus de 11 millions d’exemplaires. Le deuxième opus, Mario et Sonic aux Jeux olympiques d’hiver, avait lui aussi trouvé son public avec près de 8 millions de ventes. Le plombier et le hérisson ont ensuite rempilé pour Londres 2012, Sotchi 2014, Rio 2016 et Tokyo 2020, mais la machine s’est essoufflée, au point qu’aucun jeu n’a été lancé pour Paris 2024. Et là où Mario s’est imposé comme un roi indétrônable dans le milieu du jeu vidéo, « Sonic est peu à peu tombé dans l’oubli », explique Romain Lebailly, historien et auteur d’une thèse sur SEGA. Jusqu’à la sortie de Sonic, le film en 2020.

« C’est un succès alors que les films adaptés de jeux vidéo ne marchaient pas vraiment auparavant. Cela a permis un renouveau complet du personnage, on le voit beaucoup plus fréquemment aujourd’hui. Il est redevenu populaire auprès du public », affirme l’historien. Sonic, le film a généré 319 millions de dollars au box-office mondial, soit le sixième plus gros succès de l’année 2020. Un tel succès que Sonic 2 est sorti en 2022 (405 millions de dollars) et Sonic 3 en 2024 (492 millions de dollars, mieux que des superproductions comme Gladiator II). Plusieurs jeux vidéo ont entretenu cette dynamique, notamment Sonic Frontiers (4,5 millions de ventes), Team Sonic Racing (3,5 millions) ou plus récemment Sonic x Shadow Generations, sorti il y a un an (2,3 millions). Un retour en grâce qui en fait forcément un objet de convoitises.

Parler aux jeunes

Le CIO ne s’y trompe pas en s’associant à un personnage au sommet de la vague, populaire auprès de plusieurs générations. « Sonic a été créé au tournant des années 1990, au moment où SEGA avait besoin d’une mascotte à la hauteur de Mario, le grand concurrent de chez Nintendo, et qui puisse parler à tout le monde, rappelle Romain Lebailly. Sonic n’est pas perçu comme un jeu japonais ou américain, ça fait partie du cahier des charges. » La jeunesse du monde entier peut ainsi s’identifier plus facilement à ce héros.

« Le CIO a bien identifié que les jeux vidéo étaient un support essentiel pour aller chercher un public très jeune, confie Patrick Clastres, qui coordonne les activités du Centre d’études olympiques de de la globalisation du sport de l’Université de Lausanne. Le CIO s’est retrouvé confronté, à la fin des années 1990, au problème du désintérêt des jeunes. Depuis longtemps, les mascottes sont une manière d’acclimater les enfants à la culture olympique et de les fidéliser. Avec les jeux vidéo, on franchit une étape puisqu’ils sont plus actifs, impliqués, leurs héros sont identifiés aux valeurs olympiques. Cela crée une culture partagée, avec la force du loisir anodin. C’est une manière presque subliminale de consolider une culture monde autour des années olympiques. »

Dans le communiqué du 6 octobre, Shuji Utsumi, président de SEGA, saluait « l’engagement du Comité International Olympique à mettre en avant l’excellence, l’unité et la persévérance sur la scène mondiale, des valeurs que Sonic incarne par sa vitesse, sa détermination et sa résilience ». Pour Romain Lebailly, cet alignement des valeurs est moins évident. « Le côté rebelle revient assez souvent pour caractériser Sonic. Je ne suis pas incroyablement convaincu qu’il représente les valeurs olympiques et qu’il y a une concordance absolue. Je pense surtout que c’est un bon coup marketing. Tout le monde y gagne. » Là-dessus, il n ‘y aura aucun débat, d’autant plus que le film Sonic 4 est déjà annoncé pour 2027.