— Publié le 3 juin 2025

Amélie Oudéa-Castéra et Didier Séminet dans le vif du sujet

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À deux semaines de l’élection, Amélie Oudéa-Castéra et Didier Séminet avaient rendez-vous lundi soir à la Maison du Sport français. Pendant presque deux heures, les deux candidats à la présidence du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) ont présenté leur vision et leurs idées. Chacun a pu s’exprimer librement pendant vingt minutes, avant une séance de questions/réponses destinée à aller plus loin et à éclairer les acteurs du sport français.

« Le mouvement sportif mérite clarté et engagement »

Amélie Oudéa-Castéra a commencé son intervention en rappelant son parcours. « Je suis une enfant du mouvement sportif », souligne-t-elle, un « pur produit fédéral », qui a pris sa première licence à 5 ans. « Je n’ai jamais pris ma carte dans aucun parti politique. Mon expérience ministérielle n’a pas été celle d’une femme politique, mais celle d’une femme en politique. Mon seul parti reste et restera le sport français », a-t-elle martelé, soucieuse de se détacher de l’étiquette de l’ex-ministre macroniste. Justement, Didier Séminet n’a pas retenu ses coups par rapport au CV de son adversaire. « Je connais le CNOSF depuis les vestiaires, et non depuis les salons feutrés de Roland-Garros », a lâché le président de la fédération française de baseball et de softball, rappelant qu’il était parti « de rien » et qu’il était « un militant, depuis toujours, pas au gré de la conjecture ».

Il alerte ainsi sur un « risque de rupture » si la base ne se reconnaît pas dans le CNOSF. Il a aussi dénoncé que la candidate écrivait avoir reçu le feu vert de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), alors que « ce feu n’est jamais passé au vert » puisque la HATVP « s’est déclarée incompétente ». D’où ses interrogations en matière de déontologie. « J’ai bien eu le feu vert explicite de la HATVP, a répondu l’intéressée. Je n’avais pas besoin de me soumettre au contrôle a priori réalisé dans de telles circonstances mais que si je suis élu à la présidence, je ferai l’objet d’un contrôle a posteriori. »

Didier Séminet avait d’autres cartouches, et il a vidé son chargeur. « C’est elle qui, lorsqu’elle était ministre, a transformé l’Agence nationale du sport en bras armé du ministère et renforcé les contraintes sur les Projets sportifs fédéraux », a-t-il pointé, en parlant d’ électoralisme. « Le mouvement sportif mérite clarté et engagement. Je parle clair, même si parfois ça dérange. Je me bats pour des idées, pour un idéal, par pour lui-même. Vous ne me verrez jamais me précipiter devant des caméras de télévision, sauf pour défendre notre cause. Je suis un homme d’action, pas une personne d’éclat », assume-t-il.

Livre blanc du sport français, IA et soutien psychologique

Sur le plan des idées, Oudéa-Castéra a présenté une quinzaine de propositions pour « un CNOSF fort, utile et moderne ». Elle souhaite organiser, à partir de novembre, « une grande consultation territorialisée sur l’avenir du sport et le club de demain, pour aboutir à un livre blanc du sport français ». Un outil « qui nous permettra de peser de manière unitaire en amont des municipales et en prévision de la présidentielle », dans un contexte où les budgets dédiés au sport se réduisent. Afin de faire « plus et mieux pour le bénévolat sportif », elle souhaite inviter les bénévoles à des événements sportifs, tout au long de l’année, « dans le cadre de week-ends bleus bien à eux, où ils pourront vivre et partager la joie du sport dans des carrés de supporters ». Elle imagine aussi « une bonification en matière de retraite pour quelques catégories de bénévoles qui ont un engagement de très longue durée ».

Elle porte le projet d’organiser « les premiers Jeux français de la jeunesse pour les collégiens et lycéens » pour « faire vivre la culture de l’olympisme ». Cette compétition multisport par équipes, « à mi-parcours entre Paris 2024 et les Alpes 2030 », associerait des disciplines d’été et d’hiver, des sportifs valides et en situation de handicap, et la phase finale aurait lieu à l’INSEP. Elle cite également la mise en place d’un fonds d’urgence pour soutenir les clubs amateurs en cas de circonstances exceptionnelles, la création d’une commission de la transformation économique, « un conseil de la prospective pour lancer un cycle de travaux et de conférences sur le sport de demain », ou encore l’ouverture de l’accès à la plateforme « Mon soutien psy » aux athlètes afin qu’ils puissent bénéficier de consultations remboursées.

Didier Séminet, lui, a exprimé une « saine colère » face aux « illusions perdues » de l’après-Paris 2024, en dénonçant le manque de respect du ministère des Sports envers le CNOSF et « l’ensemble du mouvement qu’il représente ». Il se dit même prêt à assigner « l’État devant un tribunal administratif pour non respect d’un engagement contractuel » suite à la suppression de « 75 % du financement dûment signé et attendu ». Dès le 20 juin, lendemain de l’élection, il lancerait une enquête nationale pour les clubs (qui concernera aussi ceux qui ne sont pas affiliés). Les universités d’été et l’Assemblée générale d’octobre permettraient ensuite de « bâtir ensemble le projet qui guidera l’action du CNOSF tout au long du mandat ».

Parmi ses objectifs, dès sa première année d’exercice : mettre en place une commission sur toutes les violences, « une IA du mouvement sportif français nécessaire à l’allègement des lourdeurs administratives », créer un média numérique pour l’ensemble des fédérations et acteurs du sport français, mais aussi « imposer un programme politique du mouvement sportif français en vue des élections présidentielles de 2027 ». Les présidents des fédérations ont encore deux semaines pour se décider. Dans un sourire, Séminet glissait lundi soir : « Je pense que le score sera de 55 % contre 45 % mais je ne sais pas pour qui. »