Candidatures

Dans la course aux Jeux, Madrid veut exclure la défaite

— Publié le 28 septembre 2021

Le CIO peut se frotter les mains. Son nouveau processus de sélection des villes-hôtes des Jeux olympiques, aussi flou qu’il est possible de l’être, ne décourage pas les vocations. Au contraire, il encourage même les postulants à se lancer aussi tôt que possible dans la course, sans attendre un signal de départ qui pourrait ne jamais venir.

Dernier exemple en date : l’Espagne. Depuis la semaine passée, les spéculations vont bon train sur une possible candidature de la capitale, Madrid, aux Jeux d’été en 2036. Ira-t-elle ou n’ira-t-elle pas ? Peut-être ou sans doute ? A quinze ans de l’échéance, la question n’est pas encore tranchée. Mais, preuve de sa pertinence, elle divise la classe politique.

Le débat a fait une entrée très remarquée dans l’actualité, au cours des derniers jours, par la grâce d’une passe d’armes entre le maire de Madrid, José Luis Martínez Almeida, et la vice-maire de la ville, Begoña Villacís (photo ci-dessus). Précision d’importance : les deux élus n’appartiennent pas au même parti politique, même s’ils siègent l’un et l’autre au sein d’un conseil municipal de coalition.

Begoña Villacís a dégainé la première dans une interview à une radio espagnole. « Bien sûr, nous aspirons à organiser les Jeux olympiques, a-t-elle assuré sans nuance. Un investissement très important a déjà été consenti pour les précédentes candidatures. Désormais, il ne serait plus nécessaire de recommencer. »

Selon Begoña Villacís, le mouvement olympique aurait même une dette envers Madrid, pour lui avoir montré la sortie à trois reprises dans ses tentatives d’accueillir les Jeux d’été, pour les éditions 2012, 2016 et 2020. La dirigeante espagnole n’en démord pas : l’édition 2036 pourrait être la bonne.

La sortie médiatiques de la vice-marie de Madrid, notamment chargée des questions sportives, n’a pas été du goût du premier élu de la capitale. José Luis Martínez Almeida s’est fendu d’un communiqué pour appeler à la prudence. « Nous devons être très prudents, a-t-il expliqué. Nous avons déjà vécu trois candidatures sans succès. Désormais, il est essentiel que nous ayons des garanties minimales de succès. Mais elles ne seront pas possibles sans une unité des institutions et un soutien des Madrilènes« .

Le message est clair : patience, assurance et consensus. A l’image d’Anne Hidalgo, la maire de Paris, au début du processus de candidature de la capitale française pour les Jeux de 2024, José Luis Martínez Almeida ne veut plus se lancer dans la bataille sans avoir des garanties de victoire. Après trois revers consécutifs, on peut le comprendre.

Entre les deux élus, un troisième personnage devrait être amené à jouer un rôle majeur : Alejandro Blanco, le président du Comité olympique espagnol (COE). Lui aussi penche pour la prudence. Il n’écarte pas l’idée d’une candidature de Madrid, mais se refuse encore à l’inscrire dans un calendrier.

« Il n’y a pas de date, a-t-il confié au site AroundtheRings. Dans un premier temps, nous travaillons sur l’organisation de championnats et d’événements internationaux, pour ensuite nous préparer aux Jeux olympiques. Mais dans le futur. »

Contexte politique mis à part, la stratégie de Madrid semble s’inspirer de l’exemple de Paris. Tout comme les Français, les Espagnols ont connu l’échec à plusieurs reprises. Comme eux, ils ont abandonné un temps leur projet, avant de le ressortir à un moment plus opportun. Pour Paris, le paysage s’est éclairci à l’horizon 2024. La comparaison se poursuivra-t-elle pour l’édition 2036 ?

Les médias espagnols anticipent déjà un possible, voire probable, retour des Jeux d’été en Europe en 2036, après Los Angeles 2028 et Brisbane 2032. Mais la règle de l’alternance des continents, longtemps respectée par le mouvement olympique, ne pèse désormais plus très lourd.

Une candidature de Madrid ne manquerait pourtant pas d’atouts. Mais l’Espagne devra d’abord régler la question de son projet olympique le plus immédiat, les Jeux d’hiver en 2030, pour lesquels Barcelone et les Pyrénées sont entrés en « phase de dialogue » avec le CIO. Les opposants à la candidature se mobilisent déjà sur le versant pyrénéen. Ils appellent à un référendum. Jamais une bonne nouvelle.