— Publié le 25 août 2021

A Tokyo, Thomas Bach n’a plus la cote

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Thomas Bach devra s’y faire : sa popularité est en chute libre au Japon. Au lendemain des Jeux olympiques de Tokyo, lundi 9 août, sa promenade sous escorte dans le quartier chic de Ginza avait été très critiquée, notamment sur les réseaux sociaux. Son séjour express aux Jeux paralympiques, entamé en début de semaine, l’est encore plus.

Cette fois, l’attaque est venue d’en haut. Shigeru Omi, un spécialiste japonais des questions sanitaires, président d’une sous-commission gouvernementale sur la lutte contre la propagation du COVID-19, a profité d’une session du Parlement pour dénoncer le nouveau voyage à Tokyo du président du CIO.

« Je me demande pourquoi il a pris la peine de venir, a expliqué le scientifique japonais, présenté comme le premier conseiller du gouvernement sur la crise sanitaire. Il devrait être capable de juger avec un minimum de bon sens. »

Shigeru Omi l’a suggéré sans prendre de gants : Thomas Bach aurait largement pu se passer de revenir à Tokyo pour les Jeux paralympiques, surtout sans se soumettre à la période obligatoire de trois jours d’isolement, à un moment où les autorités japonaises exhortent la population à rester chez elle, à éviter les sorties non essentielles et à privilégier  le télétravail. Selon lui, la venue du dirigeant allemand envoie un mauvais message.

« Il est déjà venu à Tokyo. N’est-il pas déjà allé aussi à Ginza ? Mon opinion sur cette question n’est pas celle de membre d’un comité d’experts, mais d’un citoyen ordinaire, a insisté le Japonais. Je pense qu’il aurait pu se contenter d’une présence virtuelle, une intervention en ligne. »

Au lendemain de la fin des Jeux olympiques de Tokyo, sa sortie dans le quartier de Ginza avait déjà fait polémique. Beaucoup s’étaient interrogés sur le traitement de faveur du président du CIO, alors que le comité d’organisation interdisait aux athlètes de faire du tourisme dans Tokyo.

A l’évidence, le soufflet n’est pas encore retombé. Yasutoshi Nishimura, le ministre japonais chargé de la gestion de la crise sanitaire, s’est engouffré mercredi 25 août dans la brèche ouverte par Shigeru Omi. Il a expliqué lors d’une autre session parlementaire qu’il avait l’intention de demander à Thomas Bach de « prendre en considération l’impact sur le sentiment national« .

Thomas Bach est invité aux Jeux paralympiques par l’IPC. Il est arrivé lundi à Tokyo, à la veille de la cérémonie d’ouverture. Il doit repartir jeudi 26 août. Mercredi, au premier jour des compétitions, il a été vu sur trois sites paralympiques, assistant aux épreuves de natation, basket-ball en fauteuil et goalball. A la piscine, il a remis les médailles aux trois premiers de deux des finales de la journée.

En soi, sa présence à Tokyo ne semble pas de nature à créer la polémique. Le CIO et l’IPC n’ont jamais été aussi proches. Les deux instances travaillent depuis quelques années main dans la main sur le marketing. Andrew Parsons, le président de l’IPC, est membre du CIO. La venue de Thomas Bach au début des Jeux paralympiques n’a donc rien de choquant.

Mais les réactions qu’elle provoque, dans l’opinion mais aussi au sommet de l’Etat, démontrent que les bons résultats des athlètes japonais aux Jeux olympiques n’ont pas inversé la tendance : les Japonais ne voulaient pas des Jeux en pleine crise sanitaire. Ils n’en veulent toujours pas. Ils les subissent, mais comprennent assez mal qu’un dirigeant international bénéficie d’un régime de faveur.