Candidatures

Berlin et Tel Aviv, candidature de la réconciliation pour les Jeux en 2036

— Publié le 9 avril 2021

Le CIO peut se frotter les mains : les candidatures olympiques, un moment en perte de vitesse, semblent retrouver toute leur vigueur. Elles cognent même à la vitre de la Maison olympique de Lausanne avec une précocité rarement entrevue.

La bataille pour les Jeux d’été en 2032 désormais quasiment bouclée, les regards se portent sur l’échéance 2036. Avec un premier projet aux allures d’OVNI : une candidature commune de Berlin et Tel Aviv. L’Allemagne et Israël réunis pour célébrer le 100ème anniversaire des Jeux de Berlin 1936, événement de sinistre mémoire, marqué par la montée du nazisme… Il fallait oser.

A ce stade, l’idée tient plus d’une « vision » que d’un projet. Elle est portée par deux personnalités du mouvement sportif allemand : Richard Meng et Frank Kowalski. Le premier préside l’Association olympique allemande, le second était le directeur exécutif des championnats d’Europe d’athlétisme 2018 à Berlin.

Les deux hommes ont détaillé leur idée dans une tribune publiée dans le Berliner Morgenpost. Ils reconnaissent que prétendre à organiser les Jeux d’été 100 ans après Berlin 1936 pourrait être mal perçu, au CIO comme en Allemagne. Mais Richard Meng et Frank Kowalski insistent : « Pourquoi considérer que cette date devrait être un motif de renoncement ? Il est tout à fait possible de prendre la question dans l’autre sens et se dire que l’année 2036 pourrait être l’occasion de montrer au monde ce qui a changé en un siècle et ce qui doit encore changer. »

Les deux Allemands poursuivent : « Pourquoi ne pas envoyer un signal fort de paix et de réconciliation ? Un signal qui ne fasse pas abstraction du fardeau de l’histoire, mais en assume la responsabilité ? L’Allemagne et Israël travaillant ensemble, plus précisément Berlin et Tel Aviv, enverrait un message très fort. »

La vision portée par Richard Meng et Frank Kowalski s’appuie sur un partage des sites et des épreuves, certes très inégal, mais non dénué de sens. Israël accueilleraient plusieurs disciplines exigeant peu d’équipements, comme le beach volley, la voile et le surf. Berlin hériterait du plat principal, avec l’athlétisme, les sports collectifs, le cyclisme…

Réaliste ? L’avenir répondra. Mais la crédibilité d’un tel projet passera forcément par un discours commun et une approche identique des deux pays. Le défi s’annonce de taille.

Le comité olympique israélien n’a pas tardé à réagir à la proposition des deux Allemands. « La tenue des Jeux olympiques à Berlin, 100 ans après les Jeux olympiques d’Hitler en 1936, nous rappellera à tous les périodes sombres que nous avons vécues et enverra un message fort au monde sur les valeurs que nous devons défendre », suggère-t-il dans un communiqué. Mais, prudent, il se garde bien d’exprimer le moindre soutien à un projet commun.

Israël n’a jamais vraiment fait mystère de son envie de recevoir un jour un rendez-vous olympique. Le pays s’est même offert une longue et coûteuse étude de faisabilité. Mais elle a conclu que l’édition 2048 serait sans doute la plus opportune, notamment pour son caractère historique, l’état d’Israël célébrant cette année-là le 100ème anniversaire de sa création.

Côté allemand, en revanche, les soutiens se sont déjà manifestés. Andreas Geisel, le ministre berlinois des Sports et de l’Intérieur, a assuré au Berliner Morgenpost que le projet enverrait « un signe fort pour la paix ». Il estime que les Jeux en 2036 à Berlin et tel Aviv permettrait de rappeler « l’abominable détournement de l’idée olympique par les nationaux-socialistes. »

A 15 ans de l’échéance, tout peut encore arriver, dans un sens comme dans l’autre. Les nombreux recalés de l’édition 2032 ne tarderont sans doute pas à sortir à leur tour de leur chapeau un nouveau projet pour 2036, revu et corrigé. L’Allemagne en faisait partie, avec une candidature d’un genre inédit, portée par la région Rhin-Ruhr. Pas sûr qu’elle résiste à l’échec de sa campagne pour les Jeux en 2032.