— Publié le 8 mars 2021

Avec Patrice Motsepe, Gianni Infantino s’assure les voix de l’Afrique

Institutions Focus

Gianni Infantino peut se frotter les mains. Sauf très improbable retournement de situation, la Confédération africaine de football (CAF) ne se dressera jamais en travers de sa route. Elle lui sera docile. Elle se rangera dans son camp. L’explication est simple : le président  de la FIFA en a choisi lui-même le futur patron.

A moins d’une semaine de son assemblée générale élective, prévue le 12 mars, la CAF connaît déjà son futur président. Le milliardaire Patrice Motsepe (photo ci-dessus, deuxième en partant de la gauche), 59 ans, un magnat du secteur minier et accessoirement beau-frère du président sud-africain Cyril Ramaphosa, sera désigné nouveau patron du football africain sans même devoir en passer par l’exercice toujours incertain du vote des délégués.

Patrice Motsepe n’aura pas d’opposant, en fin de semaine, au moment de la désignation. Ses trois anciens rivaux ont tous choisi de se désister à son profit. Précision : Patrice Motsepe est le candidat de Gianni Infantino.

La manoeuvre de la FIFA pour aboutir à un tel résultat, pompeusement qualifié d' »unité africaine » par l’instance internationale du football, a été organisée en deux temps. Une première réunion à Rabat, au Maroc, à la fin du mois de février, pour déblayer le terrain, répartir les rôles et se découper le gâteau. Puis une seconde plus formelle, dimanche 7 mars, au Palais des Congrès de Nouakchott, en Mauritanie, en marge de la finale de la Coupe d’Afrique des Nations des moins de 20 ans.

Lors de la première réunion, la FIFA a obtenu sans trop de peine le renoncement du Sénégalais Augustin Senghor et du Mauritanien Ahmed Yahya, deux des candidats de la première heure. Les deux hommes ont accepté de se ranger sur le bas-côté en échange d’une même compensation : un poste de vice-président.

A Rabat, Jacques Anouma, l’ancien président de la Fédération ivoirienne de football, a entendu lui aussi les émissaires de la FIFA lui proposer un poste de conseiller du président en échange de son renoncement. Sur le moment, il a semblé accepter. Mais son directeur de campagne a rapidement assuré qu’il continuait la course.

A Nouakchott, dimanche 7 mars, Jacques Anouma a fini par céder. Lui aussi s’est désisté au profit du milliardaire sud-africain. L’Ivoirien est apparu à la tribune, avec Gianni Infantino, Patrice Motsepe, Augustin Senghor et Ahmed Yahya (photo ci-dessus), au moment de célébrer « l’unité retrouvée » du football africain.

Preuve de l’implication très directe, et même personnelle, de Gianni Infantino dans la manoeuvre, le communiqué officiel publié au soir de l’accord de Nouakchott cite les propos du président de la FIFA. « L’accord obtenu par les candidats est un signal fort pour l’Afrique, également pour le monde, suggère Gianni Infantino. Une Afrique unie derrière une vision et un projet concrets sera plus forte. Ensemble, nous sommes plus forts. C’est ce que nous ont dit les associations membres africaines ces dernières semaines, donc je suis certain qu’elles sont elles aussi très heureuses à ce moment précis. »

Selon la version officielle, également rédigée par la FIFA, Patrice Motsepe dirigera la Confédération africaine de football avec « un programme commun » construit à partir des manifestes de campagne des quatre candidats.

Ancien avocat enrichi par ses investissements dans les mines d’or en Afrique du Sud à la fin des années 90, Patrice Motsepe n’a jamais occupé la moindre fonction officielle dans une instance du football. Ses seuls états de service : la propriété d’un club de football dans son pays natal, les Mamelodi Sundownset. Mais il est devenu en 2008 le premier milliardaire noir africain au classement Forbes. Sa richesse est évaluée à 2,8 milliards de dollars.

Avec son élection, Gianni Infantino devrait s’assurer les 54 voix de l’Afrique. Toujours bon à prendre dans la perspective d’un nouveau mandat à la tête de la FIFA. Précision : Patrice Motsepe deviendra, sitôt sa victoire acquise, vice-président de la FIFA.

Seule ultime zone d’ombre : le cas Ahmad Ahmad. Le dirigeant malgache, élu à la présidence de la CAF en 2017 face à Issa Hayatou, a fait appel devant le TAS de sa suspension de cinq ans prononcée par le comité d’éthique de la FIFA. Il a été auditionné la semaine passée. Le verdict pourrait être rendu dès ce lundi 8 mars.

En cas de décision favorable de la juridiction basée à Lausanne, Ahmad Ahmad pourrait se présenter face à Patrice Motsepe vendredi 12 mars lors de l’assemblée générale de la CAF. Mais ses chances seraient minimes.