— Publié le 28 février 2020

Pour les athlètes russes, attendre sans savoir

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Malheureux athlètes russes. A moins de 150 jours de l’ouverture des Jeux de Tokyo 2020, ils ne savent toujours pas s’ils seront autorisés à participer à l’événement olympique. Et ils pourraient bien l’ignorer jusqu’au tout dernier moment.

Le Tribunal arbitral du sport (TAS) a dévoilé via un communiqué, publié tard dans la soirée de jeudi 27 février, les détails et le timing de la procédure d’arbitrage dans le différend entre l’AMA et l’agence russe antidopage (RUSADA). Pour rappel, l’instance mondiale antidopage recommande une suspension du sport russe pour une période de 4 ans. Elle concerne la participation de ses athlètes aux grands-rendez-vous mondiaux, l’interdiction d’organiser des événements internationaux sur le sol russe et, par extension, celle se porter candidat à l’accueil de compétitions planétaires.

Dans sa communication, le TAS explique que l’audition ne sera pas publique. L’AMA en avait fait la demande. Mais, précise le tribunal basé en Suisse, elle n’a pas pu être acceptée en « l’absence d’un accord entre les différentes parties. » Pas vraiment décisif.

Le TAS annonce aussi que la procédure sera conduite par un trio d’experts, présidé par le juge Mark L. Williams. L’Australien sera assisté du Franco-Iranien Hamid G. Gharavi et de l’Italien Luigi Fumagalli. Les trois hommes partagent un solide expérience des audiences dans le domaine du sport. Elle ne leur sera pas de trop.

Autre nouvelle : le TAS a choisi d’inviter du beau monde dans la salle des débats. Il explique avoir accepté, au titre des « parties intervenantes », le CIO et l’IPC, les comités olympique et paralympique russes, la Fédération internationale de hockey sur glace (??), et plusieurs athlètes russes. Leur identité n’a pas été dévoilée.

Mais le plus important est ailleurs. Il tient dans le timing de la procédure. Prudent, le tribunal suisse se garde bien de donner une date trop précise, mais ses indications en disent long sur la suite des événements.

« Le calendrier de la procédure pour le dépôt des observations écrites a été établi, il s’appliquera jusqu’à la mi-avril 2020, détaille le TAS dans son communiqué. Les instructions relatives à la tenue d’une audience seront publiées ultérieurement. » Mais le tribunal l’indique clairement : les auditions ne débuteront pas avant la fin du mois d’avril 2020.

La complexité du dossier, ses enjeux, et le grand nombre d’intervenants, rendent illusoire la perspective d’une audition rapidement bouclée. Elle devrait durer. Et pourrait même s’éterniser.

Il faudra ensuite attendre l’annonce de la décision du TAS. Pour les mêmes raisons, elle ne pourra pas être prise en urgence. A titre de comparaison, le TAS doit rendre son avis ce vendredi 28 février dans l’affaire du nageur chinois Sun Yang, dont l’audience s’est déroulée le 15 novembre. Trois mois et demi donc, entre l’audition et la décision.

Qu’en sera-t-il pour le dossier du sport russe ? A ce stade de la procédure, impossible de répondre. Mais il semble peu probable qu’elle soit réglée en un temps record, ses conséquence dépassant largement le cadre d’un seul individu, pour toucher une nation toute entière, et pas la moindre.

Précision importante : la sanction demandée par l’AMA, une exclusion du sport russe pour une période de 4 ans, est suspendue dans l’attente de la décision du TAS. Les athlètes russes peuvent donc participer normalement aux compétitions internationales, y compris les épreuves qualificatives aux Jeux de Tokyo 2020. A l’exception notable des représentants de l’athlétisme, leur fédération (RusAF) étant suspendue par World Athletics depuis le mois de novembre 2015.

Les Russes connaîtront-ils leur sort avant les Jeux de Tokyo ? Possible. Pas sûr. Dans un tel scénario, il reviendra à chacune des fédérations internationales des sports olympiques d’été de faire un tri entre les Russes présumés propres et ceux suspectés de dopage. Les premiers gagneront un statut de neutralité et pourront disputer les Jeux. Les autres n’auront pas d’autre choix que les suivre sur leur sofa.

Auront-elles le temps de boucler un tel exercice en quelques semaines, voire quelques jours ? Difficile à croire.