— Publié le 26 avril 2018

« Pour les paralympiques, il faut dépasser la loi »

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Après les Jeux olympiques, au tour de l’événement paralympique de mobiliser l’équipe de Paris 2024. Le COJO reçoit pour deux jours, à partir de ce jeudi 26 avril, le Comité international paralympique et son président, le Brésilien Andrew Parsons. Au menu, une première journée consacrée à la « revue de projet ». Puis, vendredi, un séminaire d’orientation organisé à l’INSEP.

La symétrie entre les deux événements s’avère parfaite. Mais les Jeux paralympiques de Paris 2024 bénéficient-ils du même traitement que la version olympique? FrancsJeux a interrogé Emmanuelle Assmann, la présidente du comité paralympique et sportif français (photo ci-dessous).

FrancsJeux: Les sites de compétition du dispositif de Paris 2024 pourront-ils répondre aux exigences des Jeux paralympiques?

Emmanuelle Assmann: Sur les sites déjà construits, comme le Stade de France, Roland-Garros ou les stades utilisés pour l’Euro de football en 2016, la base est là. Mais on veut travailler sur le dernier kilomètre: la sortie d’un transport en commun, l’accès depuis le parking… L’accessibilité doit être améliorée, et cela pour tous les types de handicap. Aujourd’hui, il existe des lois. Mais nous voulons profiter des Jeux de Paris 2024 pour aller au-delà des textes législatifs. Par exemple, la loi oblige à des mesures d’accessibilité pour les personnes en fauteuil, mais rien n’est prévu en matière d’audio-description. Aujourd’hui, il est déjà acquis qu’elle sera installée sur les sites des Jeux de Paris 2024. Nous l’avions fait avec l’UEFA pour l’Euro de football 2016. La Solideo s’est engagée à recruter une personne dédiée uniquement aux questions d’accessibilité.

Qu’en sera-t-il de toutes les autres zones olympiques, en dehors des sites de compétition?

Nous y travaillons aussi. Les zones de célébration, notamment. La question avait été posée pour l’Euro de football. Elle représente un défi, car il est souvent dit que l’accessibilité n’est pas compatible avec la sécurité. Il faudra mettre en place des moyens de rendre ces zones accessibles, par exemple dans la conception des portiques de sécurité.

 

 

En termes de transport, Paris et sa banlieue sont-elles prêtes à accueillir les Jeux paralympiques?

Les transports constituent notre plus gros challenge. Les nouvelles lignes du Grand Paris Express seront toutes accessibles. Mais un travail reste à faire sur la communication. Les aides existent, pour accéder aux quais et monter dans les trains, mais elles ne sont pas toujours faciles à trouver. Surtout, nous voulons profiter des Jeux de Paris 2024 pour mettre un pied dans la porte et faire avancer le dossier. Le métro historique de Paris n’est pas intouchable. Aujourd’hui, seulement 3% des lignes sont accessibles. Nous devons augmenter ce pourcentage. Cela aura un coût. Mais il faut concevoir une accessibilité universelle, pas seulement destinée aux personnes en situation de handicap. Les seniors ou les personnes avec des enfants, par exemple, sont aussi concernées.

Les Jeux paralympiques vous semblent-ils placés en bonne position parmi les nombreux dossiers du COJO Paris 2024?

Oui. Comme nous, dans le mouvement paralympique, l’équipe de Paris 2024 est déterminée à faire de l’accessibilité l’un des héritages des Jeux. La volonté est là. Il faudra ensuite trouver les moyens. Dans les transports, par exemple, les chantiers sont très nombreux dans le cadre du Grand Paris Express. Rien ne sera simple.

Les Jeux de Paris peuvent-ils servir d’accélérateur au sport paralympique?

Aujourd’hui, les moyens manquent. L’écart entre l’argent dépensé par l’Etat pour un athlète olympique et paralympique est de 1 à 15. Laura Flessel, la ministre des Sports, veut vraiment réduire cet écart, même si le contexte actuel ne facilite pas les choses. Elle s’est engagée à une aide de 1,5 million d’euros pour la préparation des Jeux paralympiques de Tokyo dans le cadre des conventions d’objectifs. Douze fédérations préparent ces Jeux de Tokyo. En considérant que les Jeux de 2020 seront un peu l’antichambre de Paris 2024, il faut leur donner dès maintenant les moyens de leurs ambitions. Aujourd’hui, environ 70% des entraîneurs dans les équipes de France handisport sont en situation de bénévolat.

La victoire de Paris 2024 a-t-elle suscité, depuis septembre dernier, l’intérêt des partenaires privés?

Les choses bougent. L’équipe de Paris 2024 avait mis en avant les Jeux paralympiques durant la phase de candidature. Nous en profitons aujourd’hui. Je sens un début d’engouement, ou au moins de curiosité, de la part des marques. Certains partenaires expliquent au COJO Paris 2024 vouloir activer aussi une campagne paralympique. Il restera toujours deux semaines entre les deux événements, mais l’esprit va perdurer.

Les Jeux de 2024 peuvent-ils contribuer à développer la pratique des disciplines handisports?

La pratique constitue un autre challenge. Le sport peut servir de moyen d’intégration dans la société. Mais aujourd’hui, nous constatons que la majorité des jeunes en situation de handicap dans les écoles sont dispensés de sport. Pourtant, peu de handicaps ne sont pas compatibles avec la pratique du sport. Encore faut-il trouver une discipline adaptée. Pour une personne en situation de handicap, le sport peut contribuer très largement à l’autonomie.