Candidatures

La diplomatie sportive, nouvelle priorité française

— Publié le 15 janvier 2014

La diplomatie sportive française existe. Depuis peu. Officiellement, seulement une poignée d’heures. Mais elle a déjà présenté ses hommes, sa philosophie et ses ambitions, ce mercredi 15 janvier, à Paris. Pour l’occasion, le monde du sport a été convié dans un lieu dont il n’a que très rarement franchi les portes, le Quai d’Orsay. « Une première, un événement inédit », a souligné Valérie Fourneyron, la ministre des Sports. A sa droite, Laurent Fabius, son collègue des Affaires Etrangères. Un attelage lui aussi inédit. Preuve du caractère historique de la journée et de son contenu.

Dans les faits, rien de très concret. Au moins dans l’immédiat. Une vingtaine d’ambassadeurs de France dans des pays influents en terme de politique sportive se sont vus remettre, plus tôt dans la matinée, au cours d’une réunion de travail qualifiée de « sérieuse et très constructive », une feuille de route qui devrait les aider à améliorer le poids de la France à l’étranger en terme de sport. Un bataillon de diplomates en poste au Qatar, au Brésil, en Chine, au Japon, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni ou en Allemagne, missionnés de façon très officielle par Laurent Fabius pour « prendre en compte totalement le sport » dans leur travail au quotidien.

Rien de très spectaculaire. Mais cette présentation de la « diplomatie sportive française », et l’existence même de ce concept, constituent une sérieuse avancée. Jamais, par le passé, la France n’avait jugé utile ou opportun de considérer le sport comme un axe diplomatique. Jamais, non plus, elle n’avait pris en compte le rôle joué par le sport, ses acteurs et ses événements, dans l’image de la France  l’étranger. Jamais, enfin, elle n’avait intégré toutes ses forces, dont le corps diplomatique, dans sa stratégie de conquête du terrain sportif international.

La raison? Réponse facile: le projet d’une candidature française aux Jeux d’été. Les premiers intervenants, Laurent Fabius, Valérie Fourneyron et Denis Masseglia, le président du CNOSF, se sont abstenus de le citer en toutes lettres. Bernard Lapasset, le patron du Conseil français du sport international (CFSI), l’a fait pour eux. « Nous avons tous envie des Jeux, plaide-t-il. Mais sachons mettre le projet en accord avec les attentes du CIO. Il doit se construire. Il faudra savoir le vendre, pas seulement sur sa qualité technique. »

De l’avis général, la démarche est la bonne. Jean-Christophe Rolland, le nouveau président de la Fédération internationale d’aviron (FISA), remarque: « Il est encourageant de voir que nous ne partons pas à la bataille sans réfléchir. Là, on met les choses dans le bon ordre. » Essar Gabriel, le Secrétaire général de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF), se félicite lui aussi de la mise en route d’une « véritable stratégie, réfléchie et concertée, qui dépasse le seul sujet d’une candidature olympique. » Il explique: « Manifestement, nous ne sommes pas dans une démarche du tout ou rien. Le projet est large et bâti sur le long terme. En cas de candidature olympique, il suffira de l’accélérer sur une période de sept ans ».

En coulisses, la salle des machines tourne à plein régime. Deux fois par mois, le CFSI tient réunion et consulte à tout-va. L’un de ses membres raconte: « Nous recevons les grandes agences de lobbying international (dont l’américaine Teneo), pour écouter leur retour d’expérience. Elles nous conseillent sur la communication internationale. » En marge du CFSI, un « Cercle français du sport international » rassemble une trentaine de Français présents dans les institutions sportives continentales ou planétaires. Essar Gabriel en fait partie. « Ce cercle a le mérite de formaliser ce réseau d’influence, dit-il. Du coup, il s’organise et s’anime. » Réfléchir avant de partir. Inédit mais prometteur.

Photo : MAE/F. de la Mure