— Publié le 15 avril 2019

Face aux athlètes, le CIO fait de la résistance

Institutions Focus

L’argent. Il en a beaucoup été question, ces trois derniers jours à Lausanne, à l’occasion du Forum international des athlètes du CIO. L’argent des sponsors, celui de l’institution olympique. Et, plus encore, l’argent qui pourrait, ou devrait, aller dans les poches des athlètes.

Selon le communiqué officiel, ce 9ème Forum international se place en tête de liste des plus importants de l’histoire. Pas moins de 350 athlètes ont fait le déplacement. Ils représentent 185 comités nationaux olympiques. En prime, une cinquantaine de fédérations internationales, plus une pléthore d’autres acteurs du mouvement olympique, dont l’IPC, l’AMA, Tokyo 2020 ou Paris 2024, ont fait acte de présence.

Paris 2024 avait installé un stand. Martin Fourcade, désigné l’an passé président de la commission des athlètes du COJO, en a profité pour débattre avec ses pairs du village olympique idéal. Prometteur.

Au terme des débats, pas moins de 9 recommandations ont été approuvées à l’unanimité, dimanche 14 avril, lors de la séance de clôture. Elles concernent, en vrac, la représentation des athlètes, le modèle de financement solidaire, la lutte antidopage, l’aide à la transition de carrière, ou encore la santé mentale des athlètes. Du concret.

Mais un sujet a occupé les conversations et alimenté le débat entre Thomas Bach, le président du CIO, et les athlètes présents à Lausanne : la règle 40.3 de la Charte olympique. L’argent, donc.

La règle en question, régulièrement montrée du doigt par les associations d’athlètes, précise qu’un compétiteur « ne peut permettre que sa personne, son nom, son image ou ses performances sportives soient utilisés à des fins publicitaires pendant les Jeux olympiques », sauf dérogation officielle. Elle est gravée dans le marbre. Elle résiste aux attaques du temps.

En février dernier, les athlètes allemands lui ont pourtant porté un coup fatal. Ils ont obtenu du bureau national antitrust qu’elle soit déclarée « abusive ». Les Allemands pourront donc la contourner. A ce jour, ils sont les seuls à bénéficier d’un tel privilège.

A Lausanne, dimanche, l’initiative allemande a été brandie par plusieurs athlètes d’autres pays, tous désireux de la voir étendue au reste du monde. Ils ont questionné Thomas Bach. Ils sont passés à l’offensive.

Le résultat en décevra beaucoup. Le président du CIO a insisté : pas question de renvoyer la règle 40.3 dans les oubliettes de l’histoire. Pas question, surtout, d’adopter une position universelle, identique dans tous les pays, sur la question des droits des athlètes face au sponsoring pendant les Jeux.

« Il n’existe pas de solution universelle », a tranché Thomas Bach à la question d’un représentant canadien.

Le dirigeant allemand l’explique : cette règle protège les partenaires mondiaux du CIO, regroupés au sein du programme de marketing TOP. Elle contribue donc aux revenus de l’institution olympique, estimés à 5,7 milliards de dollars pour l’olympiade 2013-16. Lesquels revenus, a insisté Thomas Bach, sont reversés pour une grande partie aux comités nationaux olympiques.

En clair, la règle 40.3 du CIO assure un financement solidaire du mouvement olympique. Elle aide les plus pauvres. Elle n’oublie personne en route.

Fin de la discussion ? Pas vraiment. Thomas Bach ne ferme pas totalement la porte à un assouplissement de la règle 40.3 de la Charte olympique. Mais, comme souvent avec le CIO, il se débarrasse du fardeau.

A Lausanne, dimanche 14 avril, Thomas Bach a conseillé aux athlètes de discuter de la question avec leurs comités olympiques nationaux. « Au CIO, nous devons adopter une approche globale. Mais le CIO permet aux comités nationaux olympiques de déterminer le cadre dans lequel ils souhaitent appliquer la règle 40.3. Ils sont les mieux placés pour déterminer ce qu’ils doivent faire pour leurs athlètes. »

Thomas Bach ne tranche pas la question. Il se contente de l’écarter de sa route. En clair, il conseille aux athlètes les plus vindicatifs de se doter d’une légitimité pour ensuite faire pression sur les autorités sportives de leur pays pour obtenir gain de cause. Il leur suggère de suivre l’exemple allemand.

« Vous pourrez alors négocier et établir un juste équilibre entre donner et recevoir », a expliqué Thomas Bach. La balle est dans le camp des athlètes et de leurs comités nationaux olympiques. Le CIO n’en veut pas.