— Publié le 25 avril 2017

Pour John Coates, l’avenir s’écrit en pointillés

Institutions Focus

John Coates, le vice-président du CIO, fêtera-t-il son 67ème anniversaire le cœur gros et l’âme en peine? Possible. Osons dire probable. Le dirigeant australien, présenté à juste titre comme l’une des personnalités les plus influentes du mouvement olympique, pourrait perdre deux casquettes d’un coup samedi 6 mai, veille de son anniversaire. Il pourrait être contraint d’abandonner la présidence du comité olympique australien (AOC), une organisation qu’il dirige sans opposition depuis 27 ans. Et du même coup, par un effet domino, sa carte de membre du CIO.

Solidement installé à la tête de l’AOC depuis sa première élection en 1990, John Coates n’a jamais eu à trop se préoccuper de son leadership national. Il était seul candidat à sa propre succession. Il enchaînait les mandats. Facile. Mais les temps changent. Cette fois, la concurrence s’organise. Pire: elle montre les dents. Danni Roche (photo ci-dessous), 46 ans, une dirigeante d’entreprises connue en Australie pour avoir décroché la médaille d’or en hockey sur gazon avec les Hockeyroos aux Jeux d’Atlanta en 1996 (et, accessoirement, pour être la fille de Ken Roche, sélectionné sur 110 m haies aux Jeux de Tokyo en 1964), se dresse sur son passage. Elle a annoncé en début d’année sa candidature à la présidence du comité national olympique.

Une menace? Plus que cela. Ces dernières semaines, la campagne a pris une tournure très périlleuse pour le candidat John Coates. Première torpille: un rapport a révélé au grand jour son salaire de président de l’AOC, une indemnité annuelle de 717.500 dollars australiens, soit environ 500.000 euros, en hausse de 40.000 dollars au cours de l’année passée. Selon la presse australienne, cette somme serait 40 fois supérieure à la moyenne de la subvention annuelle versée par l’AOC aux 15 plus « petits sports » de l’organisation. Les médias ont également découvert que plus de la moitié du budget de l’AOC (52%), estimé à 22 millions de dollars l’an passé, était consacrée aux dépenses de fonctionnement.

 

 

Danni Roche a saisi l’occasion au vol pour jurer ses grands dieux que, en cas de victoire le jour de l’élection, elle assurerait la fonction de façon totalement bénévole, suggérant que l’argent versé tous les ans à John Coates serait nettement mieux utilisé pour la préparation des athlètes et des équipes nationales.

Deuxième attaque: une plainte de Fiona de Jong, l’ancienne directrice exécutive de l’AOC, contre Mike Tancred, le directeur des médias du comité olympique, un proche de John Coates. Démissionnaire l’an passé, Fiona de Jong avoue aujourd’hui avoir été victime de brimades et de harcèlement de la part de Mike Tancred.

John Coates n’est pas resté sans réaction. Il a rédigé en début de semaine une lettre, dont la presse australienne s’est procurée une copie, où il évoque « une campagne pleine de rancune » et suggère que ces attaques visent avant tout à ternir son image et le travail accompli tout au long de ces années. En clair, il crie au complot, convaincu d’être la victime d’une manœuvre de déstabilisation orchestrée par sa rivale pour la présidence du comité national olympique.

En attendant, la situation est en train de lui échapper. A la demande de plusieurs de ses membres, une réunion de crise du conseil de l’AOC a été convoquée en urgence. Elle doit se tenir avant la fin de la semaine. Dans le même temps, deux des personnalités les plus écoutées de l’économie et du mouvement sportif australiens ont publiquement appelé à un « changement de culture » au sein de l’AOC et au départ de John Coates. Ann Sherry, l’ancienne directrice de la Bank of Melbourne, actuellement à la tête de la Fédération australienne de rugby, et Leigh Clifford, directeur de la Fédération d’équitation et président de la compagnie aérienne Qantas, ont pris position en faveur de Danni Roche.

Hasard ou pas, Thomas Bach a envoyé en début de semaine un courrier à Carlos Nuzman, le président du comité olympique brésilien, pour lui demander d’intégrer la commission de coordination des Jeux de Tokyo 2020. En prévision d’une place bientôt vacante? La commission en question est présidée par John Coates. Mais le dirigeant australien doit son statut de membre du CIO à son rôle de président du comité national olympique…