— Publié le 14 février 2014

Les médias en panne de polémiques

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Comment mesure-t-on au quotidien la réussite d’une quinzaine olympique ? A l’ambiance sur les sites ? A la mine des athlètes ? Aux taux d’audience des télévisions du monde entier? Rien de tout cela. A Sotchi comme ailleurs, l’indice le plus fiable reste la conférence de presse organisée tous les matins, au centre principal de presse, par le CIO et le comité d’organisation des Jeux. Un rituel quotidien où la nature des questions en dit souvent beaucoup plus long sur l’état de santé des Jeux que tous les chiffres fournis par les uns et les autres.

Vendredi 14 février, la conférence de presse du jour a rassemblé à la tribune deux habitués de l’exercice, Mark Adams, le porte-parole du CIO, et Alexandra Kosterina, son homologue du comité d’organisation, plus deux invités de marque, le patron des Jeux, Dimitry Chernyshenko, et le Suisse Gilbert Felli, directeur exécutif du CIO. Dans la salle, quelques poignées de journalistes.

Pour l’essentiel, les réponses des intervenants fournissent rarement matière à s’enflammer. Le CIO est passé maître dans l’art d’étouffer dans l’oeuf toute tentative de début d’intention de polémiquer. Quant aux Russes, ils révèlent à Sotchi un égal talent. La vraie curiosité se situe donc dans les questions. A la moindre anicroche dans l’organisation, elles se font directes et coriaces. Au premier signe d’une « affaire », elles fusent comme des missiles.

Ce vendredi 14 février, huitième jour des Jeux de Sotchi, rien de rien. Un calme plat comme la Mer Noire. Un Canadien demande si, après Sotchi et sa température estivale,  le CIO aura désormais tendance à plutôt attribuer les Jeux à des villes où l’hiver ne se traverse pas en tongs et manches courtes. Gilbert Felli répond: « Mais rappelez vous Vancouver 2010! Nous avons eu quatre jours de pluie, suivis par une chaleur écrasante. »

Une journaliste interroge le directeur du CIO sur la manière de rendre les Jeux de Sotchi plus « joyeux ». Gilbert Felli rétorque: « La joie, j’ai bien cru en voir un peu partout dans les sites, chez les spectateurs et les athlètes. Comme on dit en Suisse, dans le canton de Vaud: « Nous sommes déçus en bien. »

Un confrère américain pose la question de l’absence d’alcool sur les sites de compétition et, citant un expression du Wall Street Journal, qualifie les Jeux de Sotchi de « plus secs de l’histoire ». Dimitry Chernyshenko explique qu’il a simplement été décidé d’appliquer la loi russe sur la vente d’alcool. Puis Mark Adams plaisante: « Nous devrions pouvoir vous aider à trouver un endroit où aller boire un verre! »

Un envoyé spécial de la presse s’aventure à sonder Gilbert Felli pour savoir si Thomas Bach a l’intention de qualifier Sotchi 2014 de « meilleurs Jeux de l’histoire » pendant son discours à la cérémonie de clôture. Le directeur du CIO explique: « Je veux d’abord vous rappeler que cette formule, inventée par Juan Antonio Samaranch, n’a jamais été utilisée par Jacques Rogge. Quant à savoir ce que dira Thomas Bach, je n’en ai pas la moindre idée. Mais laissons d’abord les Jeux se poursuivre. »

Enfin, un journaliste assis au premier rang traduit sans vraiment le vouloir le sentiment général en s’adressant ainsi à Dimitry Chernyshenko: « Malgré ce tableau sans tâche, existe-t-il au moins une question, un point de l’organisation, qui vous tracasse et ne vous rend pas heureux? » Réponse du Russe: « Non ».

Jusqu’ici tout va bien. Très très bien. « Nous sommes très heureux, tout se passe à merveille », a assuré Gilbert Felli, au nom du CIO, dans son message d’introduction. A sa droite, Dimitry Chernyshenko en a même un peu rougi.